Bourse: repli technique en vue en février?

Publié le 26/01/2018 à 16:02

Bourse: repli technique en vue en février?

Publié le 26/01/2018 à 16:02

Si le baromètre de janvier 2018 s’annonce encore plus favorable pour l’année entière que celui de l’an dernier, février pourrait être une autre histoire.

Les observateurs sont un peu plus nombreux à lancer un signal d’alerte à leurs clients à plus court terme.

À peine trois jours après avoir suivi le mouvement haussier en relevant sa cible pour le S&P 500 de 2800 à 3000, pour la fin de 2918, voilà que Bank of America Merrill Lynch se coiffe du chapeau de prudence à court terme.

Dans ce que le stratège en chef appelle un «signal de repli tactique», Michael Harnett, juge qu’un mouvement de recul apparaît très probable au cours du premier trimestre.

Son indicateur Bull & Bear a en effet grimpé à 7,9, soit le niveau d’euphorie le plus élevé depuis mars 2013, et très près du signal clair de vente de 8,0 et plus.

«L’indicateur Bull & Bear a donné onze signaux de vente depuis 2002. Il s’ensuivit un recul moyen de 12% dans les 12 mois suivants, en Bourse», rapporte-t-il.

En revanche, après le signal de mars 2013, le S&P 500 s’est apprécié d’encore 19% pendant 12 mois, reconnaît M. Hartnett, d’où sa prévision d’une simple correction technique.

Retour en force aux actions

C’est que les investisseurs de la planète ont englouti 33,2 milliards de dollars américains de plus dans les fonds d’actions lors de la semaine close le 19 janvier, un record selon cette firme.

Quelque 7G$US sont allés aux actions américaines, 4,6G$US aux fonds d’actions européennes et 8,1G$ aux actions des pays émergents.

L’ajout d’un autre 5G$US dans les marchés émergents, la semaine prochaine, déclencherait le premier signal de vente pour ces marchés depuis août 2014, précise le courtier.

Les clients de fortunes privées haussent aussi leur répartition en actions au plus fort rythme en dix ans, note aussi le stratège, tandis que la part de 10% qu’ils accordent à l’encaisse est à un plancher record.

Enfin, 98% des Bourses du monde s’échangent au-dessus de leur moyenne mobile des 50 et des 200 derniers jours, un autre signe de danger à court terme.

«Les investisseurs volent de plus en plus près du soleil, espérant que leurs ailes ne soient pas faites de cire», a évoqué Damian Kastel, stratège de CLSA. 

Le marché des obligations de sociétés (corporate bonds) étant plus sensible aux changements d’humeur des investisseurs que les actions, les retraits d’argent des populaires fonds d’obligations à rendement élevé, au cours de 11 des 13 dernières semaines, peut être un indicateur avant-coureur d’un repli en Bourse, renchérit M. Hartnett.

Des drapeaux plus jaunes que rouges

La liste de signaux de prudence cités s’allonge ces derniers jours.

À l’instar de l’économiste David Rosenberg de Gluskin + Sheff, M. Hartnett, rappelle aussi que le bras de fer entre les États-Unis et l’Europe concernant leur monnaie respective, dont on a eu un avant-goût pendant le Forum économique de Davos, avait été l’une des conditions ayant mené au krach d’octobre 1987.

Goldman Sachs a récemment présenté un graphique illustrant que l’appétit mondial du risque des investisseurs est le plus élevé depuis 1991.

«L’appétit de risque extrême augmente les probabilités de déception, mais historiquement les données macro-économiques fondamentales sont plus importantes pour les marchés», a nuancé le stratège Ian Wright.

L’indice de force relative gonflé du S&P 500, soit 70 pour la seizième séance d’affilée le 25 janvier, la plus longue série depuis 1996, est aussi un indicateur contraire, a noté Bloomberg.

À cela s’ajoute le nouvel optimisme affiché par tant de titans du monde financier à Davos, tels que Ray Dalio, fondateur et PDG de Bridgewater, Larry Fink, PDG de Blackrock ou encore Jamie Dimon, PDG de JP Morgan Chase.

Chez Charles Schwab, la stratège Liz Ann Sonders, a constaté que lorsque l’indicateur de surprises économiques de Citigroup atteint ou dépasse le niveau de 75, les données économiques déçoivent ensuite.

Le lendemain, la croissance de 2,6% du PIB américain au quatrième trimestre de 2017 a raté la cible de 3% de nombres d’économistes.

La chute du taux d’épargne des Américains, à 2,6%, un plancher en 12 ans, fait aussi craindre que les consommateurs seront moins dépensiers que prévu en 2018.

«C’est possible, mais la baisse des impôts (qui prend effet en février) devrait atténuer le choc», croit Krishen Rangasamy, économiste à la Financière Banque Nationale.

Ce courtier s’attend à ce que la reconstitution d’inventaires et la reprise des dépenses des entreprises suffisent à accélérer la cadence américaine de 2,3% en 2017 à 2,5%, en 2018.

Digestion probable en février et fort baromêtre de janvier

Le dernier mot revient à Jeffrey A. Hirsch, président du Stock’s Trader Almanac.

Le mois de février a mauvaise réputation, mais historiquement il a tendance à consolider les gains de janvier, particulièrement lorsque l’appréciation du premier mois de l’année a été vigoureux, indique-t-il, dans un récent bulletin à ses abonnés.


« En février, Wall Street prend du recul et réévalue les perspectives du reste de l’année en fonction de la performance de janvier »

Lors des 20 ans depuis 1950 pendant lesquelles le S&P 500 s’est apprécié d’au moins 4% en janvier, l’indice phare termine le mois de février inchangé ou avec un gain de moins d’un pourcent, 65% du temps, précise le mordu de statistiques boursières.

De plus, lors de la deuxième année du cycle présidentiel, février se tire mieux d’affaires, avec des gains moyens d’un pourcent.

«Mes perspectives restent optimistes. L’élan technique est robuste. Les facteurs fondamentaux sont très positifs, tout comme les indicateurs saisonniers. Ceci dit, une phase de digestion modeste est fort probable en février, étant donné la force récente des achats d’actions», a-t-il ajouté, par courriel.

M. Hirsch met aussi la montée boursière dans son contexte historique. Il rappelle qu’en janvier 1976, le Dow Jones a grimpé de 14,4%. Son gain de 7,7% à ce jour en 2018, se classe au sixième rang depuis 1901.

Le bond de 7,4% du S&P 500 à ce jour en 2018 est au cinquième rang des meilleurs mois de janvier de l’histoire.

Si le baromètre de janvier s’avère encore juste, - et c’est un petit indicateur parmi tant d’autres - la Bourse américaine pourrait connaître une autre bonne année, selon les annales, pour la dixième année du mouvement haussier.

Lorsque janvier est rentable, l'année l'est aussi 88% du temps. Lors d'une trifecta, soit un rally du père Noël, suivi d'une première semaine haussière et d'un mois de janvier positif, le baromêtre de janvier est plus fiable.

Dans ce cas, les probabilités que les onze mois suivants soient rentables passent à 89,7%, tandis que celles que l'année entière le soit passent à 93,1%. Le gain moyen annuel: 18%.

Relisez Un vrai bull market, y croyez-vous?

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
Sujets liés

Économie , Bourse

Blogues similaires

Immobilier: un marché qui vous empêche de dormir?

Édition de Mars 2024 | Denis Lalonde

BILLET. Selon la Banque Nationale, l’accessibilité au logement au 4e trimestre de 2023 s’est détériorée au Canada.

Ce n'est pas la fin du monde

Édition du 20 Mars 2024 | PHILIPPE LE BLANC

EXPERT INVITÉ. Le pessimisme et le fatalisme ne font pas de bons investisseurs boursiers à long terme.

Verizon, le nouveau défi de Manon Brouillette

Édition du 16 Juin 2021 | Stéphane Rolland

ANALYSE. La notoriété a une dimension régionale. La nomination de Manon Brouillette à la ...