Montréal inaugure son premier makerspace: une histoire de persévérance

Publié le 30/05/2017 à 08:21

Montréal inaugure son premier makerspace: une histoire de persévérance

Publié le 30/05/2017 à 08:21

Par Diane Bérard

Espace Fabrique, le premier makerspace montréalais, permettra de réduire de 90% le coût de réalisation d'un prototype

Au fil des ans, Montréal a perdu 75% de sa capacité manufacturière. On ne peut pas revenir en arrière et ramener le manufacturier lourd en ville. Mais il existe une autre voie, le manufacturier urbain.

Objectif: réduire de 90% le coût de développement des prototypes

Plusieurs entrepreneurs et artisans ont des projets qui pourraient se transformer en PME, et créer des emplois, s’ils avaient accès à de la machinerie. Sans ça, impossible de créer des prototypes. Et sans prototype, impossible d’avoir accès à du financement.

La solution: un makerspace. C’est un lieu de plusieurs milliers de pieds carrés où l’on peut avoir accès à des machines-outils. Vous devenez membre, puis vous payez un frais de location horaire, mensuel ou annuel pour utiliser l’équipement. De plus, vous avez accès à une liste d’opérateurs qualifiés, si vous souhaitez sous-traiter la fabrication de votre prototype. Chaque makerspace compte un ou plusieurs techniciens conseillers sur place. Sans compter des espaces d’entreposage et de petits bureaux fermés. En accédant à un markerspace, un entrepreneur ou un artisan peut réduire de 90% le coût de développement d'un prototype.

Le premier makerspace montréalais sera lancé vendredi le 2 juin. Il se nomme Espace Fabrique et il est situé dans le sud-ouest, au 4767 rue Dagenais, dans un local de 12 000 pieds carrés. Espace Fabrique se trouve à 10 minutes du métro Place Saint-Henri. Il aura fallu quatre années de persévérance à Emmanuelle Raynauld (une diplômée en arts visuels spécialisée en art robotisé) et ses partenaires pour que ce projet devienne réalité. Pendant ces années, j’ai vu Emmanuelle répéter patiemment son pitch dans de nombreux événements. Et je me suis promise de raconter son histoire si son projet voyait le jour.

La voici.

Après ses études, Emmanuelle s’est rapprochée des fablabs (des laboratoires certifiés destinés à l’apprentissage et l’expérimentation des technologies de commande numérique. On en trouve dans les universités, par exemple), des hackerspaces (des lieux équipés de serveurs et de matériel électronique permettant de bidouiller une technologie pour qu’elle serve à un autre usage que ce pour quoi elle a été créée) et des makerspaces (des ateliers de fabrication et d’usinage).

En 2012, Emmanuelle supervise le lancement du fablab échoFab, de Communautique, dont les locaux se situent dans l’ETS. «J’aime les fablabs. Ils répondent à un besoin. Mais pas à celui que je tente de combler, explique-t-elle. Il y a toute une communauté qui ne peut pas réaliser ses projets parce qu’elle n’a pas accès à de l’équipement industriel. Ce sont ces occasions d’affaires ratées que je veux récupérer avec notre makerspace. Je veux aussi rajeunir le secteur manufacturier.»

«Ne vois pas trop grand. Débute petit pour tester...»

Comme je l’ai dit plus haut, Emmanuelle a «promené» son projet longtemps. Chaque fois, on lui répond, «Ne vois pas trop grand, débute petit pour tester.» Elle refuse. «Il faut une masse critique d’équipement pour attirer des membres» À force de persévérance, elle décroche le gros lot: un ange financier voit dans ce projet un avantage pour Montréal. Suivront d’autres bailleurs de fonds comme Filaction, Desjardins, la Ville de Montréal, la Fiducie du Chantier de l’économie sociale et le Réseau d’investissement social du Québec (RISQ). Elle peut aussi compter sur le soutien du Quartier de l’innovation. Mais l’entrepreneure n’a pas choisi la voie facile en optant pour une structure coopérative. «Mon projet tombe entre deux chaises. Les bailleurs de fonds traditionnels n’aiment pas financer des coops. Et les financiers des coops n’ont pas l’habitude des coops manufacturières. Bref, personne n’était à l’aise avec mon concept!».

Pas facile de trouver un local de 12 000 pieds carrés

On pourrait penser que le déclin du secteur manufacturier faciliterait la quête d’un espace vacant de 12 000 pieds carrés. Pas du tout! «Les locaux industriels abordables se trouvent à Ville Saint-Laurent et à Ville d’Anjou. Le reste a été détruit. Pour refaire l’échangeur Turcot, par exemple, on a exproprié 80 bâtiments industriels. Quant aux bâtiments qui se trouvent dans les quartiers centraux, ils sont devenus hors de prix. L’espace que vous payez 5$ à 8$ le pied carré à l’extérieur vous coûtera 12$ à 15$ le pied carré à Rosemont ou dans le Mile End.» Espace Fabrique signe finalement son bail en juillet 2016. Le financement est bouclé en novembre 2016. Et l’aménagement, qui a coûté 500 000$, débute en février 2017. Au total, on y installe 300 000$ d’équipement. Il en coûtera 20$ pour devenir membre à vie de la coop. Et pour 200$/mois ou 2000$/année les membres ont accès à toutes les machines-outils. Il existe aussi des forfaits à la journée. Espace Fabrique prévoit attirer entre 15% à 20% d'artistes et 30% de «patenteux». Le reste du membership sera composé d'entrepreneurs.

À quatre jours de l’ouverture d’Espace Fabrique, que retient Emmanuelle Raynauld des quatre dernières années?

«J’ai appris à flairer les opportunistes. Des gens ont vu le potentiel de mon projet se sont collés à moi pour en tirer les retombées sans vraiment offrir quelque chose en échange. Je les ai mis à la porte.»

«Je suis aussi devenue championne dans l’art d’ajuster mon discours pour capter l’intérêt de mon interlocuteur. J’ai compris les intérêts des différentes parties dont il me faut la collaboration et je sais quels aspects du projet mettre en lumière.»

«Je sais aussi que le succès d’une telle initiative repose sur la communauté que nous bâtirons autour d’Espace Fabrique. C’est pour cette raison que nous avons inclus une cuisine de 700 pieds carrés qui peut accueillir des événements de 150 personnes. Des conférences et des ateliers, il y en aura.»

Je terminerai en disant que si l’inauguration d’Espace Fabrique est prévue pour le 2 juin, le site web, lui, existe depuis quatre ans déjà. Cela démontre la force de conviction d’Emmanuelle Raynauld et de ses quatre partenaires. «À la ville de Montréal, ils sont tannés de me voir!», conclut-elle en riant.

 

 

 

 

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