Manufacturier urbain: l'histoire du canard jaune et de Bâtiment 7, à Pointe-Saint-Charles

Publié le 03/06/2016 à 09:35

Manufacturier urbain: l'histoire du canard jaune et de Bâtiment 7, à Pointe-Saint-Charles

Publié le 03/06/2016 à 09:35

Par Diane Bérard

L'entrepreneur Craig Wolfe fabrique son "Good Duck" au Michigan plutôt qu'en Chine

Aujourd’hui, on parle de canard en plastique, du secteur manufacturier, des défis de la cohabitation dans les villes et d’un laboratoire urbain à Pointe-Saint-Charles.

Le canard en plastique jaune est né aux États-Unis à la fin du 19e siècle. Il doit son apparition à la démocratisation du caoutchouc, par Charles Goodyear. Très vite, le mignon petit volatile devient un jouet iconique. Il fait le bonheur des enfants… et la richesse des manufacturiers américains. Jusqu’au jour où il prend le chemin de la Chine, comme la plupart des produits bon marché.

Un homme, Craig Wolfe, fondateur de CelebriDucks, décide de ramener le volatile à la maison! Depuis quatre ans, une partie de sa production est fabriquée à New York. En fait, CelebriDucks a trois usines : une en Chine, une à New York et une au Michigan. Celle du Michigan fabrique « The good duck » qui se veut « Le canard le plus sécuritaire au monde ». Il est fait sans latex ni PVC.

Évidemment, le canard de Craig Wolfe se vend plus cher que les canards faits en Chine. Voici ce qu’en dit l’entrepreneur :

1- « Je suis le seul actionnaire de mon entreprise, je n’ai pas à me soucier de maximiser la valeur à court terme. J’estime qu’à moyen et à long terme ma stratégie est pérenne. Les salaires chinois grimpent. La qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Et superviser à distance est complexe. »

2- « Il faut comprendre son marché et la psychologie de son consommateur. Le canard en caoutchouc est le seul jouet que les bébés ont constamment dans la bouche. Pensez-vous que les mamans vont choisir la version bon marché lorsqu’on leur offre une version un peu plus dispendieuse, mais complètement sécuritaire? »

Le cas du canard en plastique incarne une  tendance : le retour du manufacturier en Amérique. On en a discuté cette semaine à Montréal lors de la conférence « Fait à Montréal », tenue au Complexe Dompark, en bordure du Canal Lachine.

On y côtoyait des artisans, des acteurs du développement économique de la ville de Montréal, des chercheurs et quelques promoteurs d’initiatives américaines (New York, Baltimore, San Francisco, etc.)

À quoi ressemble le nouveau secteur manufacturier urbain?

1-Il fabrique des produits hauts de gamme et sur-mesure

2-Il recrute une main-d’œuvre spécialisée et éduquée

3-Il vend une valeur « symbolique ». Les consommateurs de ces produits sont prêts à payer plus cher pour des produits fabriqués localement. Le nouveau secteur manufacturier urbain n’a rien à voir avec celui de nos parents ou de nos grands-parents. C’est à la fois sa force et sa faiblesse.

Les forces de nouveau secteur manufacturier urbain

1-Il permet des quartiers plus complets. Des quartiers où l’on peut résider, travailler et se divertir. Il limite les déplacements et la congestion. À Montréal, on trouve des zones d’emplois manufacturiers, entre autres, dans le Mile End, le Mile Ex, autour de De Casteleau, de Beaumont, etc. Il s’agit généralement de grands édifices qui ont jadis eu une vocation manufacturière. Certains avaient été abandonnés et retrouvent aujourd’hui une nouvelle vocation manufacturière. La différence : là où se trouvait une entreprise employant 200 personnes logent 20 entreprises employant chacune 10 personnes.

2-Il fournit de bons emplois bien rémunérés. L’OBNL immobilier new-yorkais Greenpoint manufacturing and design center possède 700 000 pieds carrés dans Brooklyn. Il loue ses espaces 20% sous les prix du marché. Cet OBNL iexiste depuis 25 ans. Les locataires sont installés en moyenne depuis huit ans. Le salaire moyen des employés est de 50 000$ US.

Les limites du nouveau secteur manufacturier urbain

1- Ce n’est pas un ascenseur social ni la porte d’entrée vers la classe moyenne.

« Il y a dix ans, l’anglais était la langue seconde de 56% des employés de nos manufacturiers-locataires, raconte Brian Coleman, de Greenpoint manufacturing. Aujourd’hui, cette proportion a baissé à 46% et elle continue de baisser. Nos manufacturiers recrutent de plus en plus des diplômés universitaires. La main-d’œuvre non spécialisée trouve de moins en moins sa place. » Ces entreprises sont trop souvent trop petites pour assumer la formation des employés, comme la grande entreprise manufacturière le faisait autrefois. Qui assumera désormerais ce rôle?

2- La spéculation immobilière pousse le secteur manufacturier urbain vers la banlieue.

« Il y a un intérêt pour le « fait maison », constate Dr Richard Shermur. Mais va-t-on pouvoir conserver les artisans manufacturiers en ville?  Rien n’est moins sûr. »

3- La mixité pose problème.

Ces temps-ci, on parle beaucoup de gentrification . D’un côté, une certaine clientèle a envie de vivre et de travailler dans son quartier. De l’autre, on ne veut pas de certaines entreprises, bruyantes ou « sales », dans sa cour. On ne veut que de celles qui sont « cutes » et ne laissent pas de traces. Bref, pour certains citoyens, une entreprise manufacturière est aussi indésirable qu'un bar.

Bâtiment 7: une expérience montréalaise à suivre

Vous vous souvenez de la bataille citoyenne contre le casino dans Pointe-Saint-Charles? Voici la suite de l'histoire. Là où devait s’ériger le casino se dessine un complexe de 90 000 pieds carrés qui aspire à abriter sous un même toit des services citoyens ( CPE, maison des naissances), des commerces et des entreprises manufacturières. Le maître d’œuvre se nomme Collecif7anous et le lieu, Bätiment 7.

« La fabrication doit revenir dans nos milieux de vie, insiste Judith Cayer, chargée de projet au Collectif7anous. On va être plus forts si on se met à penser en termes de quartiers complets. »

L’ouverture du complexe Ateliers 7 est prévue pour l’automne 2017. D’ici là, il reste de nombreux défis financiers, humains et logistiques à surmonter.Un exemple : alors qu’il est minuit moins cinq pour ce projet, l’entreprise « Les forges de Montréal » vient d’exprimer le désir de s’installer à Bâtiment 7. On parle ici de fabrication lourde. « On rebrasse nos cartes pour voir où les installer dans le complexe », commente Judith Cayer. On a bien hâte de voir comment ce casse-tête sera résolu.

Le complexe Bâtiment 7 constitue un laboratoire de mixité urbaine. Il nous offre une vision de ce à quoi nos quartiers pourraient ressembler.. Voyons quels acteurs auront l’audace de jouer les pionniers et de s’y installer pour faire le test.

 

 

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