La différence entre entrepreneuriat productif et entrepreneuriat non productif

Publié le 18/12/2014 à 13:32

La différence entre entrepreneuriat productif et entrepreneuriat non productif

Publié le 18/12/2014 à 13:32

Par Diane Bérard

À force de parler des startups et de starifier les jeunes entrepreneurs on pourrait croire que l'entrepreneurariat américain se porte bien. Pas du tout! Certains secteurs sont peut-être plus dynamiques que d'autres, mais au total, les États-Unis sont en panne d’entrepreneuriat. Le taux de création d’entreprises a décliné de 12% entre 1980 et 2008. Et, en 2011, ce taux était 25% plus bas que celui de la fin des années 80. Il y aurait 1,1 million d’emplois de plus aux États-Unis si le taux de création d’entreprises était le même que celui des années 80, estime l’économiste John Haltiwanger, de l’université du Maryland.

Les Américains lancent moins d’entreprises. Et les entreprises existantes pratiquent de plus en plus l’entrepreneuriat non productif.

Il existe deux types d’entrepreneuriat : l’entrepreneuriat productif et l’entrepreneuriat non productif. L’entrepreneuriat productif crée de la valeur et des emplois. L’entrepreneuriat non productif investit, entre autres, dans le lobbying, l’optimisation fiscale et l’évasion fiscale. Le premier crée. Le second protège. Cette thèse a été développée dans les années 90 par l’économiste William Baumol. Elle n’a jamais été aussi pertinente.

Voyons ce que ça donne concrètement

Entre 1998 et 2010, les entreprises américaines ont doublé leurs investissements en lobbying. Ce lobbying avait principalement pour but de poser des barrières à l’entrée à la concurrence. Comme ce que fait présentement dans l’industrie du taxi ou celle de l’hôtellerie en réaction à Uber et airbnb, par exemple.

On peut attribuer une partie de la baisse du taux de démarrage au succès de l’entrepreneuriat négatif pratiqué par les sociétés établies. Elles mutliplient les barrières à l'entrée. Or, les PME créent davantage d’emplois que les firmes établies, comme le démontrent plusieurs études, dont celle-ci de l’OCDE. De plus, une économie efficace repose sur une réallocation régulière des ressources. Plus le processus de réallocation est entravé, moins productive devient l’économie. Jusqu’à devenir carrément non productive.

J’ajouterais qu’il semble exister une corrélation entre le niveau de lobbying pratiqué par une entreprise et la rémunération de son pdg. Les sociétés qui pratiquent le lobbying le plus intense sont aussi celles où les pdg sont les mieux rémunérés. Le lobbying serait donc considéré comme une activité créatrice de valeur par le conseil d’administration. Et par le marché aussi, puisque les sociétés qui font le plus de lobbying seraient aussi celles dont le titre performe le mieux. Une bonne nouvelle pour les actionnaires et tout ceux pour qui voient le monde un trimestre à la fois. Mais ce n’est pas une bonne nouvelle pour la société en général. Les entreprises qui font du lobby paient moins d’impôts et elles empêchent la venue de concurrents donc la réallocation des ressources et l'innovation. En 2011, 1/3 des sociétés américaines avaient plus de 16 ans. C’est 50% de plus qu’en 1992, souligne le Brookings Institute. C’est beaucoup trop.

Tout cela pour dire qu’il faut se méfier du mot « entrepreneuriat », il n’est pas automatiquement synonyme de croissance. Seul l’entrepreneuriat productif l’est.

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