Comment gérer l'enfant de 4 ans qui sommeille en chaque employé

Publié le 08/05/2017 à 11:35

Comment gérer l'enfant de 4 ans qui sommeille en chaque employé

Publié le 08/05/2017 à 11:35

Par Diane Bérard

Préférez-vous le kayak ou le rafting? «La plupart des gens choisiront une excursion en kayak en eaux paisibles plutôt qu’une descente en rafting en eaux turbulentes, dit le professeur Stewart Black, spécialiste en leadership à l’Insead (Institut européen de l’administration des affaires). Ceci explique pourquoi 60% à 80% des changements organisationnels majeurs échouent. On jette les employés dans des eaux agitées et on s’attend à ce qu’ils pagaient avec le sourire.» Il poursuit, «Pensez aux résolutions de début d’année. Ce sont des changements que nous avons choisis et qui ne dépendent que nous. Pourtant, nous n’arrivons pas à les mener à terme. Imaginez un changement que vous n’avez pas choisi, dont vous ne voyez pas la nécessité et qui implique toute une organisation!»

J’ai assisté à une présentation privée du professeur Black, lors de son passage à Montréal pour une réunion de diplômés nord-américains de l’Insead. Voici ses messages-clés.

Première barrière au changement: l’enfant de 4 ans qui sommeille en chaque employé…

« En période d’incertitude organisationnelle, chaque employé redevient un enfant de quatre ans. Il pose en boucle la même question à ses supérieurs: «pourquoi?», dit le professeur Black. Or, le supérieur lui, répond plutôt à la question «quoi?». L’organisation est pressée d’implanter le changement. Mais l’employé n’ayant pas de réponse satisfaisante à son «pourquoi?», il fait comme l’enfant de quatre ans et se referme.» On se doute que si l’employé n’écoute pas, il n’agira pas.

Le paradoxe du succès ou pourquoi nous n’aimons pas le changement

Une entreprise connaît le succès parce que ses employés font les bonnes choses et qu’ils les font bien. Ils sont compétents. Ils maîtrisent leur métier. Puis l’environnement change et ce que vous et votre organisation faites ne rapporte plus. Vous voilà champion mondial de quelque chose dont on ne veut plus. Votre organisation vous demande de changer, de maîtriser d’autres savoir-faire. Mais qui a envie de devenir moyen lorsqu’il a été premier de classe? «On tire plus de satisfaction à livrer une performance exemplaire à quelque chose de désuet qu’une performance ordinaire à quelque chose en demande. C’est la nature humaine», souligne le professeur Black.

 D’où la nécessité qu’une organisation explique clairement à ses employés pourquoi elle doit changer. En fait, elle ne doit pas l’expliquer. Les employés doivent le réaliser eux-mêmes.

Stewart Black cite le cas d’IBM sous la présidence de Lou Gerstner. Arrivé en poste en avril 1993, le nouveau PDG lance son mantra : IBM vendra des solutions, pas de boîtes et elle migrera d’une vision locale à une vision globale. « Pourquoi IBM changerait-elle après 50 ans de succès ? Et pourquoi devrais-je changer? Je fais bien mon travail. J’ai reçu de bonnes évaluations. Nos difficultés sont temporaires », commentent les employés. Lou Gerstner les ignore. Ils l’ignorent aussi. Le titre plonge. IBM fait marche arrière. On invite le professeur Black à animer des ateliers au cours desquels les employés se penchent sur la situation d’IBM. Ils en arrivent à la conclusion que les TI sont devenues trop compliquées pour simplement vendre un produit. Les clients ont des besoins qu’ils n’arrivent même pas à exprimer. Et, de toute façon, les produits IBM ne sont pas différenciés. Bref, le salut passe par le service. Les employés d’IBM ont trouvé la réponse au «pourquoi?». Du coup, le «quoi?» leur est apparu évident.

Deuxième barrière: la peur du vide

IBM demande à des gestionnaires qui ont toujours supervisé des équipes locales de prendre en charge des équipes nationales et multidisciplinaires par-dessus le marché. Elle réclame de ses vendeurs d’équipements qu’ils proposent désormais des solutions. Bref, elle les place face à la perspective d’un suicide professionnel. Elle les force à être incompétents pendant une durée plus ou moins longue. «Les entreprises qui surmontent la première barrière au changement, le «pourquoi?» se retrouvent face à celle de la performance. Le tiers des efforts de changement échouent à cette étape parce que les entreprises forcent leurs employés à se jeter dans le vide au lieu de leur bâtir un pont.» Ce pont est constitué des nouvelles compétences, de la nouvelle proposition de valeur, de nouvelles connaissances, de nouvelles habiletés de gestion, etc. IBM a dispensé 10 jours de formation à des centaines d’employés.

Troisième barrière: on perd la foi

Les employés comprennent la nécessité du changement. Ils sont formés adéquatement pour affronter les nouveaux défis qui les attendent. Mais… le changement ne sera jamais complété. Pourquoi? «Les employés se découragent, tout simplement, répond le professeur Black. Lorsque vous accomplissez une nouvelle tâche, les résultats sont rarement fracassants. En fait, ils sont souvent ordinaires. On se lasse d’obtenir des résultats ordinaires. Alors, on abandonne. » À moins de recevoir régulièrement des mots d’encouragement qui nous permettent de voir la pertinence de persévérer. «Ça ne suffit pas de savoir que la direction croit au changement, insiste Stewart Black. Les employés ont besoin d’encouragements venus du terrain, de la part de gens qui comprennent les difficultés concrètes auxquelles ils font face.»

L’éternel recommencement…

« Toute entreprise qui occupe la première position verra toujours sa place convoitée, reconnaît Stewart Black. Aucun changement ne garantit une avance permanente. Évitons toutefois le fatalisme. On sait ce qui nous a fait perdre notre avantage. On sait ce qu’il faut faire pour se réinventer avec succès. C’est simplement qu’on ne le fait pas. On reste bloqué à l’une des trois barrières. »

 

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