Résolution : ralentir !


Édition du 16 Janvier 2016

Résolution : ralentir !


Édition du 16 Janvier 2016

Quoi de plus inspirant que cette belle année qui commence pour prendre du recul et déceler les tactiques qui optimiseront la croissance de notre entreprise au cours des prochains mois. Revigoré par ce nouveau départ, on prend souvent la résolution de faire plus et de faire mieux. L'heure est au changement.

Je ne profiterai pas de cette tribune pour vous conseiller de revoir vos objectifs financiers, de maximiser votre présence en ligne ou de briser les carcans qui étouffent la créativité de vos employés. Comment le pourrais-je ? Je ne suis pas vous. Personne ne connaît mieux les besoins d'une entreprise que ceux qui la composent.

J'aimerais toutefois partager avec vous un questionnement qui saura, je l'espère, vous fournir quelques pistes de réflexion.

Et si on renouait avec l'art de ne rien faire ?

Vous avez bien lu. Alors que le culte de la perfection poursuit sa montée en puissance, alors que la procrastination est décriée comme le pire ennemi des entrepreneurs, j'ose militer en faveur de l'antiperformance. Mon message peut sembler contradictoire avec la course effrénée que nous impose le quotidien. J'en suis parfaitement consciente. Le milieu des affaires exige une rapidité et une efficacité de tous les instants. Mon horaire chargé peut en témoigner ! Mais je reste néanmoins convaincue que savourer le moment présent, sans attente ni jugement, est une étape incontournable pour grandir comme entrepreneur... et comme société.

Les enfants, miroir de notre folie

Je partage mon quotidien avec cinq adorables petits-enfants. Chaque jour, ils me fascinent par leur intelligence, leur vivacité et leur sensibilité.

Les enfants sont la richesse vivante de notre pays. Au nom de l'épanouissement, on ne lésine sur aucun effort pour développer leur potentiel en fonction de leurs talents et intérêts. C'est bien normal. Après tout, on souhaite leur transmettre tous les outils nécessaires pour leur assurer un bel avenir. En plus de leurs études, on remplit leurs petits agendas de matchs de hockey, de cours de musique, de sorties éducatives, de séjours linguistiques, de lectures enrichissantes... Nos enfants ont la chance de vivre dans un environnement qui les stimule comme jamais auparavant.

Cette mer de possibilités présente toutefois un revers. Entre les devoirs et la pratique de soccer, en passant par le spectacle de ballet, les enfants courent du matin au soir. Et ils sont à bout de souffle. Ont-ils non seulement le temps de regarder les nuages, de sauter dans les flaques d'eau, de s'amuser, de respirer ? Ont-ils encore le temps d'être des enfants ?

Au-delà de nos enseignements, les plus jeunes nous observent et nous imitent. Nous sommes leurs modèles. Comment peuvent-ils apprendre l'art de ne rien faire si on leur transmet involontairement la pression de la performance à tout prix ?

Inconsciemment ou pas, notre rôle de parent est teinté par les injections de réussite que nous commande la société. Est-ce que je stimule assez mon enfant ? Est-ce que ses jeux sont assez éducatifs ? Est-ce que je favorise le développement de son cerveau, de sa motricité, de ses aptitudes sociales ?

Cette quête absolue de perfection est non seulement nuisible pour nous, mais elle a également des répercussions sur la jeune génération. De fil en aiguille, sournoisement, notre réalité de fou est devenue leur réalité de fou. On semble avoir oublié le simple plaisir d'être ensemble.

Et si on se regardait droit dans les yeux quand on se parle, au lieu de loucher sans cesse vers l'écran de notre téléphone ? Et si on fermait la télévision et la radio, simplement pour apprivoiser la beauté du silence ? Et si on donnait la parole aux enfants et qu'on les écoutait vraiment, dans leur imagination, dans leurs désirs, dans leur folie... Je suis convaincue que leur discours pourrait nous surprendre.

Au cours de la prochaine année, je nous invite, en tant que société, à laisser nos enfants lâcher leur fou. Mieux encore, lâchons notre fou avec eux ! Ne serait-ce que quelques heures par semaine, prenons une pause de devoirs, de cours et de pratiques en tout genre. Contentons-nous de rire aux éclats, de partager un moment complice, de construire une cabane avec des couvertures, de jouer une partie de Monopoly... Les enfants restent en pyjama toute la journée ? La vaisselle n'est pas finie ? Et alors !

Peu importe la voie que vous choisirez de suivre en cette nouvelle année, il serait sans doute profitable de le faire en ralentissant votre cadence. Comme entrepreneur, vous gagnerez en calme, en ouverture et en créativité. Comme personne, vous serez plus concentré et disponible, au lieu d'être perdu dans le tourbillon de vos pensées. Comme parent, vous enseignerez aux adultes de demain le secret du bonheur et de l'équilibre, deux apprentissages qu'ils ne feront pas sur les bancs d'école.

En guise de conclusion, une citation de Margaret Lee Runbeck : «Le bonheur n'est pas une destination, mais une façon de voyager». Je vous laisse sur ces mots plein de sagesse. Mes petits-enfants m'attendent pour une partie de cartes !

Bonne et heureuse année 2016 !

Danièle Henkel a fondé son entreprise en 1997, un an après avoir créé et commercialisé le gant Renaissance, distribué partout dans le monde. Mme Henkel a été plusieurs fois récompensée pour ses qualités de visionnaire et son esprit entrepreneurial. Elle est juge dans la téléréalité à caractère entrepreneurial Dans l'oeil du dragon, diffusée à Radio-Canada.

Suivez Danièle Henkel sur Twitter @daniele_henkel