Des politiques de courte vue

Offert par Les Affaires


Édition du 13 Décembre 2014

Des politiques de courte vue

Offert par Les Affaires


Édition du 13 Décembre 2014

Imaginez un seul instant une famille de classe moyenne de trois enfants, installée sur la Rive-Sud et dont les deux parents travaillent à Montréal avec des horaires différents... Il lui faudra débourser de 3 000 à 6 000 $ de frais de garderie par an. Somme à laquelle s'ajouteront les frais inhérents aux véhicules et aux futurs péages qu'on ne manquera pas de nous imposer un jour ou l'autre pour franchir le fleuve. Conséquence probable : nombre de femmes préféreront rester à la maison et s'occuper de leurs enfants. Un effet contraire à celui obtenu à l'instauration des garderies à 5 $, qui avait permis à 70 000 femmes de rejoindre le marché du travail. À moins que les familles ne décident tout simplement d'abandonner leur rêve d'avoir un enfant de plus. Un comble, dans une province à la population vieillissante et qui affiche un net déficit de natalité.

À l'encontre des règles élémentaires

Ce qui m'inquiète le plus, c'est que cette proposition ouvre la porte à un système qui, si on l'accepte, nous ferait payer un service ou un produit, non pas en fonction de sa qualité ou de ses bénéfices, mais en fonction de notre capacité de le payer. Une décision politique qui va à l'encontre des règles les plus basiques de l'économie, du commerce et de la concurrence.

Imaginez un seul instant, et ce n'est pas de la science-fiction, que demain vous soyez obligés d'acheter un produit ou un service à un prix établi en fonction de votre déclaration de revenus... L'essence, le câble, votre abonnement téléphonique, vos assurances, et pourquoi pas votre pain et votre lait ! Pourquoi voudriez-vous que des gens se surpassent pour réussir si à la fin du mois, il ne leur en reste pas plus dans la poche que dans celle de leur voisin qui se contente de se laisser vivre. Pourquoi voudriez-vous que nos jeunes fassent des études supérieures, en ayant même parfois du mal à les financer, si en fin de compte ils ne vivent pas mieux que cet autre qui a décroché dès le début du secondaire ? Ce serait balayer d'un revers de main des valeurs aussi précieuses que l'ambition, le travail, la persévérance, l'envie de réussir, ou encore cet esprit entrepreneurial que l'on se bat pour éveiller.

Bien sûr, il y a la vocation. Bien sûr, il y a l'estime de soi... Mais que diable ! Allons-nous enfin avoir un jour l'honnêteté de parler positivement d'argent ? Que ce soit clair, ce n'est pas à la richesse que je fais allusion. Gagner plus d'argent n'est plus un luxe aujourd'hui, c'est devenu une nécessité. Et dans le cas de l'entrepreneur, l'argent n'est qu'un outil qui lui permettra d'investir, de développer des ressources qui le rendront plus concurrentiel, et probablement de mieux rémunérer ses collaborateurs. Mais à quoi cela servira-t-il, si...