Le délire (parfois) des fêtes d'enfants

Publié le 09/09/2016 à 08:15

Le délire (parfois) des fêtes d'enfants

Publié le 09/09/2016 à 08:15

Je dois être sévèrement carencé sans m’en rendre compte. Je ne vois aucune autre explication à mes dépendances multiples et à mon mauvais caractère: toute mon enfance, j’ai été privé de fêtes grandioses qui réunissaient tous mes petits amis à l’occasion de mon anniversaire.

Je devais me contenter d’un (seul) cadeau, d’un gâteau au chocolat Duncan Hines coiffé de quelques bougies et du traditionnel «Bonne fête» entonné par les membres ma famille. Je ne me souviens pas qu’il y ait déjà eu un seul ballon? Ni un ami d’ailleurs. On dirait un roman de Michel Tremblay, mais c’était partout pareil.

Aujourd’hui, ça tourne à la fête foraine! Bar à bonbons, jeux gonflables, lapins, machine à bulles, animaux en peluche, maquilleuse, sacs à surprises, pizzas, mix de musique de circonstance… C’est du sérieux. Je crois que des parents sont passés à côté de leur rêve, soit faire carrière chez Beauce Carnaval ou être Guy Laliberté.

Cette tendance à organiser des fêtes mémorables a fait pousser une petite industrie spécialisée d’animateurs de toutes sortes. Des entreprises de loisir ont vite flairé ce joli marché: promenade équestre, parcours d’arbre en arbre, bataille au laser… tous offrent des forfaits «anniversaire» pour les groupes de bambins. Il suffit de taper «fête d’enfants» dans Google pour constater la vive concurrence que se livrent les clowns, les magiciens, les princesses et autres jongleurs pour extirper les gamins d’un ennui assuré.

Pour une activité le moindrement sophistiquée destinée à cinq enfants, les prix sont dans les environs de 200 dollars. À ce prix, les petits monstres n’ont souvent rien à manger. Il faudrait bien les nourrir, j’imagine, puis penser au cadeau du petit jubilaire. La facture grimpe facilement à 300 dollars… oui 300 dollars pour une petite activité organisée pour l’anniversaire d’un enfant de sept ans. Je voudrais bien vous dire que cela me paraît du délire, mais comme il s’agit ici du bas de la gamme, je manquerais de qualificatifs pour ceux qui tentent de reproduire l’ambiance de Disney dans leur cour arrière.

Qui est le premier qui a eu cette idée de vouloir en mettre plein la vue à une vingtaine de gamins et à leurs parents avec de l’animation, des animaux de ferme, des maquilleurs, des jeux à ne plus finir, des cadeaux et un buffet? Parce qu’il paraît que c’est depuis longtemps devenu une épidémie.

Parlons seulement du nombre d’enfants. Depuis quand peut-on avoir 15 ou 20 amis? Où est la ligne entre le 15e invité et le 16e qu’on n’invite pas. À cause de ses dents croches? De sa médiocrité au ballon-chasseur? Parce qu’on l’a déjà surpris à se mettre un doigt dans le nez? Je pose la question, car on ne se racontera pas d’histoires, je ne connais personne, même pas un mioche de millionnaire, qui pourrait compter 15 vrais amis. Alors pourquoi rameuter tout ce monde sur sa pelouse, avec leurs géniteurs en plus?

Il y a des parents, comment dire,… exaltés? Leur petit Mathis-Adorable, le 7 610 003 429e humain sur terre, est accueilli tel un Veau d’or. Ils veulent démontrer au chéri qu’ils l’adorent, mais je les soupçonne aussi de vouloir rayonner auprès de la confrérie des parents.

Si seulement il n’y en avait qu’un…

Il suffit qu’il y en ait un premier qui commence pour réveiller tous les autres zélés. Et voilà c’est parti dans la surenchère de fêtes, avec toujours plus de gamins et d’animation.

Ce ne sont pas tous les parents qui suivent, au contraire! Mais cette majorité de parents est quand même obligée d’accompagner leur petit à la fête de Mathis-Adorable. Évidemment, leur enfant à eux aimerait bien lui aussi, pour son anniversaire, avoir l’armée de clowns, la pyramide de mini-burgers, la fontaine de chocolat et la procession de petits camarades, une offrande à la main. Même s’ils ne cèdent pas à autant d’extravagance, ces parents subissent une certaine pression et dépenseront peut-être un peu plus qu’ils l’auraient fait autrement pour souligner l’anniversaire de leur enfant.

Mon collègue et sa conjointe ont trois jeunes filles. Leur plus grande commence à être invitée à des fêtes d’anniversaire. Ils leur faut chaque fois apporter un petit cadeau (25$), puisque ça semble être devenu la norme. Il faudra peu de temps avant que leurs trois enfants soient invités à ces partys. Avant même d’organiser les fêtes pour leur progéniture, en une année, ils auront sorti quelques centaines de dollars de leurs poches pour payer les cadeaux des gamins des autres!

Ils ne sont pas comme ça, le collègue et sa conjointe, mais j’imagine la réaction d'autres parents lorsqu’ils reçoivent le faire-part pour le prochain anniversaire de Mathis-Adorable. «Ah non, un autre de samedi de bousillé pour ce p’tit gâté pourri!»

Ils sont comme ça les parents extraordinaires. Ils peuvent parfois taper sur les nerfs des parents ordinaires.

Suivez-moi sur Twitter / Pour lire mes billets précédents

À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.