L'AMF s'en mêle, Universitas forcée de reprendre sa consultation

Publié le 05/10/2018 à 06:00

L'AMF s'en mêle, Universitas forcée de reprendre sa consultation

Publié le 05/10/2018 à 06:00

Universitas bat en retraite. La fondation doit reprendre à zéro la consultation qu’elle a menée à la fin de l’année dernière dans le but d’assouplir les règles d’attribution de ses bourses d’études. Elle s’y est engagée alors qu’elle faisait l’objet d’une enquête de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Ça lui coûtera cher.

L’AMF ne conteste pas le droit de la fondation de consulter ses clients et de modifier les règles de son REEE collectif REEEflex. Après avoir étudié des dizaines et des dizaines de plaintes de souscripteurs, le gendarme des marchés financiers a cependant constaté que les parents n’avaient pas été informés adéquatement de l’impact des changements apportés aux règles entourant le versement des paiements d’aides aux études (PAE). Les PAE, c’est l’argent que touchent les enfants au moment d’entamer leurs études postsecondaires.

«Nous avons ouvert une enquête à la suite de nombreuses plaintes et nous avons engagé des démarches auprès d’eux. Il n’y a pas de pénalité ni d’accusation, mais Universitas doit reprendre le processus correctement», dit le porte-parole de l’AMF, Sylvain Théberge.

Le 10 décembre prochain, les clients d’Universitas seront donc appelés à se prononcer de nouveau sur les modifications au REEE collectif lors de l'assemblée annuelle. Ils pourront aussi le faire par la poste jusqu'au 6 décembre. Le processus sera lancé dans un mois. 

Rappelons que l’année dernière, Universitas a proposé à ses clients de réduire les critères d’admissibilité aux PAE de son plan collectif REEEflex. Au coeur du débat: l'attrition, une caractéristique du REEE collectif. La réforme en atténuait l'effet en permettant à plus d’enfants de se qualifier pour les bourses d’études, mais venait réduire du même coup le montant auquel avaient droit ceux qui se qualifiaient selon les anciennes règles.

Les parents ont été invités à voter sur la question en 2017. Universitas a été critiquée pour avoir mis de l’avant les avantages des modifications proposées sans informer suffisamment les souscripteurs de l’impact négatif que les changements pourraient avoir sur les bourses de certains enfants. À peine 15 % des parents concernés ont participé au plébiscite. Plus de 90% d’entre eux ont voté en faveur des changements, dont plusieurs qui allaient perdre au change.

Ce n’est que plus tard, en consultant le relevé de leur REEE, que ces parents ont réalisé l’ampleur des pertes : des milliers, parfois des dizaines de milliers de dollars. S’estimant lésés par ce processus, ils se sont regroupés récemment pour mener une action collective contre Universitas, tout en multipliant les plaintes auprès de l’AMF et les sorties dans les médias.

Universitas doit maintenant reprendre tout ça, à la demande de l’AMF. 

Qu’importe, cette dernière se retrouve maintenant dans une position où, forcément, un groupe de parents aura le sentiment de subir un préjudice. Si jamais le résultat de la consultation de janvier dernier devait être renversé, ceux qui étaient avantagés par la nouvelle formule auront l'impression de perdre. S’il était maintenu, les insatisfaits actuels pourront persister à dire que les nouvelles règles bafouent le contrat auquel ils ont adhéré, il y a des années.

Pour Isabelle Grenier, vice-présidente exécutive chez Universitas, les probabilités qu’on revienne aux anciennes règles sont minces. «Nos sondages démontrent qu’une vaste majorité de nos souscripteurs sont en faveur des changements apportés», dit-elle.

Universistas s’est engagée à dédommager l’un ou l’autre des groupes de parents, selon le résultat du vote. Ces «mesures d’atténuation», selon les mots de la fondation, atteindront «au moins» un million de dollars.

Pour une organisation comme Universitas, la somme est énorme. Isabelle Grenier affirme que l’argent sera puisé dans le budget d’exploitation de la fondation, et que les dédommagements accordés aux parents désavantagés n’auront pas d’incidences sur les frais de fonctionnement du REEE collectif. L’organisme devra rogner ailleurs, selon elle. Mais où? Elle n’a su le dire.

Bien que stables depuis quelques années, les frais de fonctionnement ont varié dans le passé en fonction des dépenses de l’organisme. Ces frais, qui ne représentent qu’une partie des coûts pour les parents qui souscrivent un REEE chez Universitas, s’élèvent à 1,18%. Voilà une donnée à surveiller dans les prochains prospectus. 

Si les «mesures d’atténuation» devaient engendrer une hausse des frais, ce serait comme si les parents payaient eux-mêmes pour les dédommagements qui leur sont versés.

Une histoire à suivre, donc.

Encore.

À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.