Immobilier: le vrai coût de la propriété

Publié le 26/05/2015 à 11:30

Immobilier: le vrai coût de la propriété

Publié le 26/05/2015 à 11:30

Photo: Shutterstock

Confession : les aptitudes pour les travaux manuels ont été inégalement réparties dans ma fratrie. Legs de mon grand-père maternel, ce talent a été en grande partie accaparé par ma sœur et mon frère ainés. Quant à mes deux autres frangins, ils ont reçu le nécessaire pour être fonctionnels avec un coffre à outils.

Moi, j’ai hérité de ce qu’il fallait pour distinguer le tournevis étoile du tournevis plat. Ça saute aux yeux, j’ai l’air d’un imposteur un marteau dans la main. C’est un sujet de moquerie abondamment exploité, et ce jusque dans la troisième banlieue de mon cercle d’amitiés. Vous avez vu Martin Matte dans Les beaux malaises effectuer des réparations dans sa maison? Je suis un peu comme ça, mais en moins drôle et en plus affligeant.

Encore en fin de semaine dernière, j’ai pu en faire la démonstration en tentant de réparer une poignée de porte récalcitrante alors que j’étais chez des amis qui m’avaient gentiment prêté leur maison durant leurs vacances. Ma vaine tentative s’est conclue sur un mot d’église bien senti, avec trois syllabes bien détachées.

Combien coûte un serrurier ? J’allais en appeler un dès le lendemain, mais les propriétaires de la maison m’ont dit de ne pas m’inquiéter, qu’ils allaient régler le problème. C’est ce qu’ils ont fait dès leur retour, avec une aisance humiliante.

L’ironie dans tout ça, c’est que j’habitais chez eux parce qu’un entrepreneur faisait des travaux chez moi. C’est alors que j’ai réalisé que ça coûtait plus cher que je croyais posséder une maison, particulièrement pour une personne comme moi qui doit assumer une prime d’incompétence manuelle.

Et j’ai songé à vous tous qui accédez à la propriété en acquérant un bien immobilier qui a besoin d’amour. Combien de fois ai-je entendu «Mon hypothèque ne me coûte pas plus cher que mon ancien loyer»? Je ne sais pas si c’est du déni, de l’inconscience ou de l’ignorance. C’est tellement plus cher que le loyer! Et ça commence par les taxes municipales. Mais ce n’est rien à comparer du reste.

Un élément que considèrent rarement les acheteurs, ce sont les frais d’entretien au moment de l’acquisition. Il y a toujours, TOUJOURS, quelque chose qui brise dans une maison : le réservoir d’eau chaude qui lâche, un balcon qui commence à pourrir, le calfeutrage des fenêtres qui craque, le toit qui coule, la peinture qui défraîchit, la toilette rose qui n’est plus au goût du jour. Et la poignée de porte qui ne répond plus. Ça n’arrête pas.

Et si vous avez un grand terrain, une piscine, une clôture, c’est pire encore. À l’émission Les Dragons, lundi, j’ai entendu Alexandre Taillefer dire qui lui a fallu débourser 11 000 $ pour se débarrasser des hannetons qui labouraient son terrain. Pour cet entrepreneur, sûrement pas, mais pour un propriétaire ordinaire, ça fait mal au portefeuille.

Seulement pour assurer l’entretien de sa maison, un propriétaire devrait prévoir un fonds de prévoyance où verser chaque année l’équivalent de 1 à 2 % de la valeur du bâtiment.  Pour une résidence de 300 000$, c'est entre 3 000 et 6 000$ par année. Ce peut être plus ou moins, selon l’âge et la qualité de la maison. Mais ce n’est assurément pas zéro.

Moins cher qu’un loyer, vraiment?

Un autre mythe au sujet de l’immobilier est de considérer la rénovation comme un investissement. Dès lors qu’on aborde ce sujet, notre cerveau cesse de fonctionner normalement.


« Un autre mythe au sujet de l’immobilier est de considérer la rénovation comme un investissement. Dès lors qu’on aborde ce sujet, notre cerveau cesse de fonctionner normalement. »


J’ai succombé deux fois à l’appel de la rénovation, question de donner du panache à la cuisine et à la salle de bain tout en les rendant plus fonctionnelles. Dans le processus, on se laisse convaincre que ça va rapporter. La table est alors mise pour les dépassements de coûts. Tu te dis «Quoi, c’est un investissement!»

Ce n’est certainement pas une dépense au même titre qu’acheter des cochonneries en plastique qui vont flotter sur la piscine, mais dire que c’est un investissement relève de la fabulation, à moins d’être un habile flippeur immobilier dans un marché en croissance. Une somme de 30 000 $ a plus de chance de fructifier dans les actions du distributeur de pièces de Quincaillerie Richelieu (Tor., RCH) que dans de nouvelles armoires de cuisine.

En faisant des gros chèques à l’entrepreneur qui refait actuellement la salle de bain chez moi, une sorte de court-circuit mental se produit pour atténuer la douleur, comme quelqu’un qui perd connaissance après avoir reçu un coup sur la tête.

Je me dis que je vais récupérer mon argent.

Sans doute un peu. Mais pas totalement. Je ne saurai jamais combien en fait. Si je vends dans cinq ans, comment pourrais-je distinguer, entre les forces du marché de l’immobilier et les améliorations que j’ai apportées à mon logement, ce qui a procuré de la valeur à ma propriété?

Mystère.

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.