De nouvelles obligations pour les propriétaires de condo

Publié le 15/06/2018 à 07:08

De nouvelles obligations pour les propriétaires de condo

Publié le 15/06/2018 à 07:08

Quelques chroniques sur le sujet m'ont valu la réputation d'être anti-condo. C'est vrai que j'ai largement documenté les inconvénients de la vie en copropriété.

De plus en plus de gens choisissent ce mode de propriété et nombreux sont ceux qui déchantent devant la gestion à la petite semaine de certains de ces complexes d'habitation. Le marché manque cruellement d'encadrement et les enjeux qui en découlent ont du mal à toucher la sensibilité des élus.

Le gouvernement libéral a déposé mercredi un projet de loi (401) qui aurait pu aplanir bien des irritants. Présenté par la ministre Lise Thériault, il devait s'attaquer à de nombreux problèmes qui affectent la gestion des copropriétés. Il imposait entre autres aux syndicats l'obligation de tenir un carnet d'entretien et d'établir les cotisations au fonds de prévoyance en fonction d'une étude sur les réparations nécessaires au fil des ans. Le projet de loi comportait également des dispositions pour améliorer l'inspection des chantiers de construction des édifices à condos, souvent trop laxiste.

Malheureusement, il a été déposé en chambre à deux jours de la fin des travaux parlementaires à Québec, qui ne reprendront qu'après les élections à l'automne. Rédiger une loi pour la soumettre au parlement dans des conditions qui l'assurent d'en faire un projet mort-né, ce n'est pas ce que j'appellerais une volonté de fer.

Sur un autre front cependant, il y a des progrès significatifs. La titanesque loi 141 qui encadre le secteur des services financiers a finalement été adoptée cette semaine. Ses éléments les plus controversés ont fait oublier quelques-unes de ses dispositions nécessaires et urgentes. Elle annonce des changements majeurs dans le domaine de l'assurance de copropriétés.

Elle obligera notamment les syndicats de copropriété à constituer une cagnotte, en parallèle au fonds de prévoyance, pour couvrir les franchises d'assurance. Indiquée au contrat, celle-ci représente la partie des dommages assumée par les assurés avant que l'assureur ne commence à verser une indemnité.

«Les modalités de ce fonds et la contribution minimale des copropriétaires seront spécifiées dans un règlement à être adopté au cours des deux prochaines années», dit Yves Joli-Cœur, avocat spécialisé qui milite depuis des années pour des réformes dans le secteur des copropriétés.

La loi indique également que la franchise doit être «raisonnable». Pour épargner sur le coûts des primes d'assurance, de nombreux syndicats décident d'augmenter la franchise. Plus la part assumée par les copropriétaires est importante, moins le risque est élevé pour l'assureur et moins les primes sont chères. Toutefois, certaines franchises sont si hautes que les assurés sont pris à la gorge au premier sinistre important. Le caractère «raisonnable» de la franchise sera précisé lui aussi par règlement, selon l'associé du cabinet juridique De Granpré Jolioceur.

Autre élément de la loi : le syndicat devra payer une assurance en responsabilité civile à ses administrateurs, à son gérant et à tous ceux qui sont impliqués dans le déroulement des assemblées de copropriétaires. Souvent bénévoles, et sans formation, ces personnes s'exposent à des risques de poursuites en s'impliquant dans la gestion d'actifs importants.

Quant aux copropriétaires, ils seront obligés de souscrire personnellement une telle assurance pour se protéger des poursuites à la suite d'un sinistre dans lequel leur responsabilité est en cause.

La loi obligera également les syndicats à mettre en place un registre dans lequel seront décrites en détail les parties privatives, autrement dit l'intérieur des condos. Le but de cette disposition est de rendre identifiables les améliorations apportées par les copropriétaires.

«Les syndicats des copropriétés établies avant le 31 octobre 2017 ont intérêt à consulter dès que possible pour créer un tel registre. Sans cette description, la loi présume que les parties privatives ne comportent aucune amélioration», explique l'avocat Yves Jolicoeur. Ce qu'il faut comprendre ici, c'est qu'en l'absence du registre, l'assureur pourrait ne pas payer pour les rénovations réalisées chez eux par les copropriétaires.

Il est fort à parier que ces dispositions pèseront sur les coûts d'assurance de certaines copropriétés. La réduction de la franchise à des niveaux raisonnables fera augmenter les primes. L'approvisionnement d'un nouveau fonds d'auto-assurance se fera à partir des poches des copropriétaires, tout comme le paiement des primes d'assurance responsabilité civile des bénévoles qui gèrent l'immeuble de copropriété. C'est le véritable prix à payer pour une protection convenable.

Il y a des moyens de réduire les coûts d'assurance. Il suffit de faire en sorte que, de manière générale, les immeubles soient mieux gérés et bien entretenus. Ça, c'est la partie à laquelle devait s'attaquer la loi 401 qui mourra probablement au feuilleton.

Un sujet à inscrire à l'agenda électoral. 

 

Lire aussi: Est-ce le début d'une révolution dans le secteur du condo?

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.