Danger! Danger! Ils sont cons ces robots!

Publié le 15/08/2017 à 11:00

Danger! Danger! Ils sont cons ces robots!

Publié le 15/08/2017 à 11:00

Des conseillers-robots qui se retrouvent en positon de conflit d’intérêts! Ce n’est pas une blague, mais ça ne nous empêche pas de rire un bon coup. C’est Bloomberg qui rapportait la nouvelle le mois dernier. Vous pouvez lire le résumé qu’en a fait le collègue Alain McKenna dans la rubrique matinale «10 choses à savoir», hier.

Comme l’anecdote est une gracieuseté du secteur financier new-yorkais, elle ne nous étonne pas. L’avidité est assez corrosive là-bas pour traverser la cuirasse des robots.

Justement, j’ai fait un drôle de rêve la nuit dernière en lien avec cette nouvelle. Je me retrouvais dans une histoire, allez savoir ce que je faisais là, qui mélangeait les scénarios des films Le loup de Wall Street et Le magicien d’Oz. À la fin, l’homme de fer blanc se fait offrir un coeur de banquier par Leonardo DiCaprio. Le gris personnage ne s’exprimait plus ensuite que par des rires gras et des grincements inquiétants. Je me suis réveillé sur un malaise.

Bref, je crains que ces services automatisés connaissent la même sort que les fonds négociés en Bourse (FNB). Nous verrons bientôt apparaître des variations tarabiscotées et coûteuses d’un produit qui se voulait à l’origine simple et abordable.

C’est toujours pareil. Un petit nouveau se pointe avec une nouvelle idée, ceux qui dominent le marché l’observent avec condescendance, avant de constater qu’ils risquent de se faire prendre des parts de leurs affaires. Ils préparent une riposte en vitesse. Tous les acteurs de l’industrie finissent par sauter dans l’arène. Ils commencent par une guerre des prix sans merci. Puis ils ajoutent des caractéristiques à leur offre pour se démarquer, ce qui leur permettra de justifier éventuellement des frais plus élevés.

Mais ce serait dommage. Les conseillers-robots, dans leur version épurée, méritent une bonne place dans le marché. Mais laquelle? Pas celle qu’on pense.

La réflexion m’est venue à la suite d’une conversation que j'ai eue avec une personne rencontrée chez un ami, il n’y a pas longtemps. Lorsqu’elle a eu vent que j’écrivais sur les finances personnelles pour Les Affaires, elle a voulu partager son expérience toute fraîche chez WealthSimple, le conseiller-robot où elle a ouvert un compte REER.

Longtemps travailleuse autonome, cette personne a franchi le cap des 45 ans, selon mon estimation. Elle a trois enfants et est membre d’une famille recomposée. Avec son conjoint, elle est copropriétaire d’un plex depuis peu. Son parcours ne lui a donné l’occasion d’expérimenter l’épargne que tout récemment, à ce que je comprends.

Elle m’explique, avec l'aplomb d'une pro de la finance, que la majorité des gestionnaires de fonds communs de placement ne parviennent pas à battre les indices boursiers et que dans les circonstances, l’investissement indiciel, moins cher, est la meilleure option. Tout l’argumentaire des conseillers-robots est là.

Elle poursuit en disant qu’au rythme de ses contributions à son compte REER WealthSimple, elle aura un coussin de 46 000 dollars à l’âge de 74 ou 75 ans. Oups! Un extra pour elle, précise-t-elle, car son plex représente son vrai «fonds de pension». Ce chiffre est basé sur la projection du robot, qui semble avoir oublié qu’on ne peut plus cotiser à un REER dès l’année de ses 71 ans.

Le robot ne précise pas non plus que l’argent sera imposé au retrait, et peut-être fortement, et que 46 000 dollars dans 30 ans, ça ne vaudra pas la moitié de ce que ça représente aujourd’hui en pouvoir d’achat. Avec cette somme, mon interlocutrice ne le réalise pas, mais elle ne pourra même pas payer pour refaire la toiture de son immeuble à revenu.

Le robot ne lui a pas offert d’analyse afin de savoir si c’est une meilleure idée de verser l’argent au CELI plutôt qu’au REER, et ne l’a pas aidée à évaluer son coût de vie et ses besoins de retraite. Il n’a dit mot sur les stratégies de fractionnement de revenu. Il a été tout aussi muet quant à la nécessité de faire un testament, et peut-être aussi une entente de vie commune. Et l’assurance vie, ce n’est pas son domaine.

Un conseiller-robot ne fait pas le travail d’un planificateur financier ou d’un fiscaliste. Et il ne fait pas les déclarations revenus à notre place. Mais à force de valoriser uniquement les faibles coûts, on en vient à oublier à quoi sert un professionnel en chair et en os, un bon, pour lesquel il faut payer.

Je sais, beaucoup d’épargnants versent des frais de gestion et n’en ont pas pour leur argent. Mais sur une plateforme automatisée, on en a que que pour son argent. Alors quand on se targue de payer peu...

Ce peut être un problème pour les gens moins familiers avec l’univers des finances, des personnes qu’on identifie pourtant comme la clientèle naturelle des conseillers-robots et à qui on dit qu'il n'y a que des frais à se préoccuper dans la vie. 

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.