Augmentation salariale: et si vous aviez raté votre chance?

Publié le 06/10/2015 à 11:46

Augmentation salariale: et si vous aviez raté votre chance?

Publié le 06/10/2015 à 11:46

La vie réserve parfois d’étonnantes surprises. Plus encore lorsqu’elle s’exprime par la fente d’une imprimante. Imaginez que vous trouviez, entre deux rapports encore tièdes, un document Excel dans lequel figurent les salaires de tous les employés de votre département. Vous découvrez alors que votre collègue, embauché après vous pour occuper un poste identique au vôtre, gagne 20% de plus.

Vous étiez jusque-là satisfait de votre rémunération, mais du coup, vous avez vaguement l’impression d’être sous-payé. Et plus vous y pensez, plus vous avez la certitude de vous faire avoir. Après tout, c’est vous qui, soir et matin, laissez vos empreintes sur l’interrupteur des lumières du bureau tandis que le collègue s’est plutôt familiarisé avec les boutons de la machine à café.

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Personne n’est assez idiot pour imprimer un document d’une telle importance sur le gros appareil beige qui longe le corridor le plus achalandé de l’étage, croyez-vous. Détrompez-vous. Cette histoire m’a été racontée par un ami. C’est lui qui a fait la découverte de la fameuse liste.

Que feriez-vous à sa place ? Les spécialistes en RH ne sont habituellement pas très chauds à l’idée d’utiliser de pareilles informations pour négocier une hausse de salaire, surtout si c’est le seul argument dont vous disposez. Il faut du doigté.

L’ami, lui, n’a pas hésité à sortir la carte de sa manche au moment de discuter de révision salariale; son rôle est stratégique dans l’organisation et son patron lui confie souvent les missions les plus délicates. Mais surtout, l’écart était trop grand pour faire comme si de rien n’était.

Je l’ai trouvé fort. Moi qui suis un émotif, j’aurais été incapable de me contenir aussi longtemps, j’aurais débarqué illico dans bureau du boss. Ou j’aurais angoissé la nuit.

L’histoire s’est terminée par une hausse de salaire de plus de 20%! Les informations dont il disposait lui ont donné un pouvoir de négociation considérable. Elles lui ont permis de savoir combien était prêt à payer son employeur pour ses compétences. Mais il lui a aussi fallu mettre en évidence tout ce qu’il avait réalisé au cours des dernières années pour convaincre son patron d’aligner son salaire sur celui du collègue.

Je vous raconte cette anecdote, car ce sera bientôt le moment de discuter de votre rétribution avec votre patron pour l’année 2016. À moins que la question ne soit coulée dans le béton d’une convention collective, ce sera peut-être le moment de négocier.

Une organisation prévoit généralement une enveloppe globale pour la hausse de la masse salariale. Selon Mercer, les entreprises canadiennes comptent augmenter les salaires de 2,8% en moyenne cette année (2,6% au Québec, selon l’ordre des Conseillers en ressources humaines agréés - CRHA).

Je vous aime bien, mais je ne pense pas que vous méritiez tous une hausse supérieure à celle de votre voisin de bureau. Il est justifié de l’espérer si vos responsabilités se sont accrues, si vous vous êtes distingués en cours d’année ou si votre rémunération accuse un retard sur le reste du marché. Dans tous les cas, vous devrez documenter vos arguments et être solidement préparés. Fixez-vous un objectif.

Si vos performances passées vous confortent dans l’idée que vous méritez plus, pensez surtout à ce que vous pouvez apporter à l’entreprise dans l’avenir pour convaincre votre patron. Il y sera très sensible.

Aussi, soyez réalistes. Si votre secteur est en déclin ou si votre entreprise vogue de rationalisation en rationalisation, vos chances sont minces. Vos perspectives seront meilleures en négociant un horaire plus flexible ou des journées de congé supplémentaires. Ça n’aidera pas à payer la hausse des frais de garde, mais ce peut être utile quand les enfants seront malades.

Cela dit, la saison pour discuter de hausse salariale a beau approcher, si vous êtes convaincu que vous avez droit à un rattrapage, c’est que vous avez probablement manqué la meilleure fenêtre de négociations: à votre embauche ou quand vous avez décroché une promotion.

Le moindre compromis à cette étape peut coûter une fortune que vous ne récupérerez jamais! Si vous avez été embauché à un salaire moindre de 20% que votre voisin, vos chances de le rattraper sont nulles, à moins de que l’imprimante ne vous fournisse un document providentiel. Sinon, et pour peu que vous manoeuvriez comme un pro, vous obtiendrez quoi? 3,8 au lieu de 2,6%?

Un écart de 20 % est énorme, mais ce n’est pas exceptionnel. Si votre rémunération à l’entrée était par exemple de 50 000 dollars, cela veut dire que votre collègue a réussi à obtenir 60 000 dollars s’il avait été embauché en même temps que vous.

À supposer que la masse salariale s’apprécie de 3% chaque année, le collègue aura empoché quelque 115 000 dollars de plus que vous en dix ans (avant impôt).

Et quand bien même vous obtiendrez un rattrapage au bout de tout ce temps, vous ne verrez jamais la couleur de cet argent.

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.