Valeant-Allergan: deux analystes, deux visions

Publié le 22/04/2014 à 09:45

Valeant-Allergan: deux analystes, deux visions

Publié le 22/04/2014 à 09:45

Il est fascinant de constater jusqu’à quel point les analystes financiers sont influencés par les dirigeants des sociétés qu’ils suivent. Il n’y a pas plus bel exemple de cela que les deux analystes de BMO marchés des capitaux suivent Valeant et Allergan et leurs commentaires relatifs à l’offre hostile de la première pour acheter la deuxième.

Rappelons d’abord que la direction de Valeant s’est unie à l’investisseur activiste Bill Ackman pour lancer une audacieuse tentative de prendre le contrôle sur Allergan, spécialisée dans les médicaments et appareils médicaux pour les yeux et l’esthétique.

La société lavaloise offre ce matin l’équivalent de 47 milliards de dollars (G$) US dans un mélange d’encaisse et d’actions (48,30$US comptant et 0,83 action de Valeant), cela après que M. Ackman, par son hedge fund Pershing Square, ait acquis une participation de 9,7% dans Allergan.

Il est très rare, voire inusité qu’une société fait une alliance avec un investisseur activiste. Ça fera jaser et, à mon point de vue, cela reste à voir si c’est une bonne chose. La réalité, c’est que Valeant n’avait pas la situation financière pour prendre une aussi importante participation dans Allergan et s’assurer que cette dernière prenne son offre au sérieux.

Alex Arfaei, analyste de BMO qui suit Valeant, est enthousiaste quant à son offre, même s’il la qualifie d’audacieuse. «Nous estimons que cette transaction pourrait produire des synergies annuelles de 1,5-2,6G$US», écrit-t-il avant même que l’offre officielle soit déposée. Et il explique en détails par la suite où Valeant pourrait trouver ces économies.

«Avec Allergan, Valeant pourrait s’établir clairement comme le leader dans les marchés des soins des yeux et de l’esthétique, deux marchés en croissance», continue-t-il.

Son collègue David Maris, qui suit Allergan, a une toute autre vision. «Tristement, les sociétés sans dette avec beaucoup d’encaisse courent souvent après les problèmes dans un climat de bas taux d’intérêt et Allergan est maintenant la plus récente à avoir ce problème», écrit-il ce matin.

Allergan a effectivement 1,5G$US en encaisse, une fois sa dette à long terme soustraite.

Qu’un analyste parle de tristesse est éloquent car cela dénote son attachement pour la société qu’il suit.

«Nous ne croyons pas que l’approche Al Dunlap de coupures massives et arbitraires pour faire «fonctionner» une acquisition réussira chez Allergan sans endommager l’entreprise», poursuit M. Maris. Si j’étais Michael Pearson, président de Valeant, cette référence à Al Dunlap me ferait grimper dans les rideaux. M. Dunlap avait la réputation de couper massivement et stupidement, au point de mettre les sociétés acquises en péril et son aventure s’est terminée avec des accusations de fraude!

Enfin, David Maris ne croit pas une seconde que les synergies annoncées sont possibles, contrairement à son collègue.

Il est rafraîchissant de constater que des analystes d’une même firme peuvent avoir des points de vue si différents. Vu de l’extérieur, il est certain que chacun prêche pour sa paroisse, influencé par les styles des dirigeants.

C’est à l’investisseur de se faire une idée, avec toute l’information disponible.

Allergan refusera probablement l’offre de Valeant-Pershing, et ces derniers reviendront à la charge avec une prime plus généreuse. Le reste est impossible à déterminer.

Bernard Mooney

 

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