Se fixer des attentes réalistes


Édition du 24 Mai 2014

Se fixer des attentes réalistes


Édition du 24 Mai 2014

Toutes les fois que j'écris au sujet des rendements potentiels à long terme, je recommande d'avoir des attentes réalistes, pour ne pas être déçu et ne pas commettre d'erreurs de planification. Mais cela mène à la question suivante : en quoi consistent des attentes réalistes lorsqu'on parle de la Bourse à long terme ?

La meilleure façon de répondre à cette question importante est de commencer par regarder le sommet de la pyramide, c'est-à-dire par les rendements des meilleurs investisseurs de tous les temps. Leurs rendements à long terme représentent le plafond que vous pouvez viser.

Selon moi, le meilleur de tous les temps est Warren Buffett. Au cours de sa carrière de plus de 50 ans, il a réussi à augmenter la valeur comptable de sa société Berkshire Hathaway à un taux annuel composé de 19,7 %, ce qui est extraordinaire (autant en vertu du pourcentage que du nombre d'années).

Un autre grand investisseur, Seth Klarman, de Baupost Group, a réalisé un rendement de près de 20 % par année depuis 1983, une performance exceptionnelle. Le fonds Templeton Growth du grand John Templeton a réalisé en moyenne 13,8 % pendant 50 ans, un rendement hors du commun.

Se comparer aux indices boursiers, un bon point de départ

Il ne faut pas se leurrer. Probablement qu'aucun des lecteurs de cette chronique n'est un John Templeton ou un Warren Buffett.

Vous ne devriez donc pas vous attendre à réaliser de tels rendements avec vos placements en Bourse.

Le meilleur barème pour vous guider est la performance des principaux indices boursiers à long terme. Ainsi, la firme de recherche indépendante Dalbar, de Boston, estime que, pour les 20 ans clos le 31 décembre 2013, l'indice S&P 500 a procuré un rendement de 9,2 %, dividendes compris. Pour la période de 30 ans, le rendement annuel est de 11,1 %.

Si vous voulez une perspective encore plus à long terme, la meilleure source est probablement Jeremy Siegel, dans son classique Stocks for the Long Run. Selon lui, les actions ont procuré un rendement annuel de 8,1 %, de 1802 à 2012.

Ce rendement de 8 % est un bon point de départ. Dire que la Bourse a eu un rendement annuel de 8 % ne signifie pas que vous devriez vous attendre à ce rendement.

En effet, tout dépend du type d'investisseur que vous êtes. Par exemple, si vous investissez par l'intermédiaire des fonds communs, vous devez tenir compte de ces trois facteurs :

1- La plupart des gestionnaires sont incapables de battre la performance des indices. À ce titre, si vous utilisez les fonds, vous devriez soustraire 1 % de la performance des indices pour calculer votre rendement potentiel.

2- Il ne faut pas oublier que le rendement des indices est théorique et ne tient pas compte des frais. Pour en tenir compte, vous devriez soustraire une autre fois 1 %.

3- Enfin, et c'est là le facteur qui tue, la plupart des épargnants sont incapables d'empocher le rendement des fonds dans lesquels ils investissent. Ils sont trop tentés de vendre lorsqu'ils craignent un repli boursier et tentés de racheter après quelques bonnes années.

Selon les calculs de Dalbar, ces réactions pénalisent sévèrement les investisseurs. Sur 20 ans, ils estiment que ce comportement irrationnel a amputé leur rendement réalisé de plus de 4 % par année.

Si vous savez compter, vous arrivez à un rendement réaliste de seulement 2 % (8 % - 1 - 1 - 4) ! Je vous console en vous disant que d'autres études sont arrivées à des résultats moins extrêmes. Par exemple, le professeur de comptabilité Ilia Dichev, de la Emory University, estime que le tripotage des investisseurs a charcuté leur rendement annuel de 1,3 %, de 1926 à 2002.

Investir dans les FNB, une belle manière de s'approcher de l'indice

Alors, soyons gentil et enlevons seulement une autre tranche de 1 % (au lieu de 4 %). On arrive ainsi à un rendement attendu de 5 %. C'est ce qui est réaliste si vous investissez en Bourse avec les fonds communs, pour les 20 prochaines années.

Malgré la différence élevée par rapport à la performance de la Bourse fondée sur le rendement du S&P 500, cela reste un bon rendement si on le compare à celui des titres à revenus fixes.

Maintenant, il y a des moyens de s'approcher du rendement de l'indice. Le premier est facile : acheter des fonds négociés en Bourse (FNB) qui reflètent le S&P 500. De cette façon, vous réduisez deux coûts systémiques : les frais et le manque à gagner résultant de la sous-performance des gestionnaires.

Enfin, si vous pouvez acheter vos FNB et les conserver sans rien faire pendant 20 ans, vous éliminez l'exorbitante pénalité liée au comportement stupide des investisseurs.

Par ailleurs, il est beaucoup plus difficile de déterminer quelles devraient être vos attentes de rendement si vous êtes un investisseur actif (c'est-à-dire que vous gérez vous-même votre portefeuille d'actions). Cela dépend entre autres de votre dévouement, de votre passion, de votre expérience, de votre approche, de votre caractère, etc. Je crois qu'un investisseur discipliné peut réaliser des rendements annuels de 8 % à 10 %, pourvu qu'il soit prêt à y mettre du temps et des efforts. Viser davantage sur 20 ans n'est pas réaliste.

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