Qu'en est-il du «supercycle» des ressources?

Publié le 01/04/2014 à 08:52

Qu'en est-il du «supercycle» des ressources?

Publié le 01/04/2014 à 08:52

(Photo: Bloomberg)

Je me rappelle ce moment avec clarté. Je partageais un café avec un contact de longue date et le voilà qu’il me lance:

«Bernard, j’aime bien ce que tu fais. Mais, arrête d’écrire que les ressources c’est cyclique. Ce n’est plus vrai!»

Je suis resté surpris un moment par son commentaire, avant de partir à rire. Je lui ai répliqué que je n’avais pas le choix, parce que c’était ce que je croyais.

Il faut dire que la personne qui me parlait avait une connaissance approndie des marchés des ressources naturelles. Ancien dirigeant d’une société minière (je l’ai rencontré la première fois en 1986, si mon souvenir est exact alors que je couvrais le secteur des ressources), il était devenu un bon investisseur spécialisé dans son industrie. Et il avait fait beaucoup d’argent durant le cycle favorable qui a pris fin en 2008.

Enfin, il était convaincu que l’industrialisation de la Chine et de l’Inde (pour ne nommer que ces deux pays) changeait la donne pour les producteurs de ressources. Et il avait une pile de documents à me confier pour démontrer son point.

C’est en pensant à lui que je constate aujourd’hui que ce qui devait être le «supercycle» des ressources ressemble de plus en plus à un cycle qu’on en a vu des dizaines dans l’histoire. Ainsi, l’indice Thomson Reuters/Jefferies CRB des matières premières se retrouve à environ 305 aujourd’hui. Et il n’a rien fait depuis un bon bout de temps. Il a bien rebondi comme le reste des marchés du creux de 2009, passant d’environ 225 à un sommet à près de 375 en 2011. Toutefois, depuis, malgré la reprise économique aux États-Unis, l’indice ne fait pas grand chose. En fait, il a glissé de 18%.

Aujourd’hui, le CRB est à peu près au point où il était il y a neuf ans!

De plus, cet indice, un des plus suivis de l’industrie, se retrouve très loin de son sommet pré-crise de 475. Il est encore à 35% de son sommet historique. Et je crois que ce sommet restera infranchi pendant encore plusieurs années.

Car, s’il est vrai que la demande de métaux a augmenté considérablement durant le cycle précédent, ce qui a favorisé la hausse des prix, un autre facteur n’est pas à ignorer. C’est l’entrée avec leurs gros sabots des financiers qui ont dirigé des capitaux importants vers cette catégorie d’actif. Par exemple, de nombreuses caisses de retraite ont voulu faire partie de la fête et ont mis une partie de leur actif dans les matières premières.

Ces entrées d’argent ont contribué de façon sensible à la hausse des prix de bien des métaux et autres ressources. Autrement dit, bien du cuivre acheté entre 2002 et 2007, pour ne nommer que cet exemple, n’a pas servi à bâtir des infrastructures en Asie. Il a servi à spéculer.

Or, ces acheteurs financiers ont été des vendeurs de matières premières depuis quelques années et le resteront encore pendant quelques années.

Le supercycle des matières premières ressemblent davantage à un titre de brochure de marketing qu’une réalité financière.

Bernard Mooney

 

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