Mooney: Le plus grand risque de Jean Coutu

Publié le 22/10/2013 à 09:30, mis à jour le 22/10/2013 à 09:50

Mooney: Le plus grand risque de Jean Coutu

Publié le 22/10/2013 à 09:30, mis à jour le 22/10/2013 à 09:50

BLOGUE. Le 9 octobre dernier, le Groupe Jean Coutu a annoncé le versement d’un dividende spécial de 0,50$ et le rachat d’un maximum de 22 millions de ses actions à 18,50$. J’ai reçu de nombreuses questions et des commentaires assez épicés concernant cette nouvelle.

Au point où je veux revenir sur le sujet.

Le premier élément litigieux concerne la fait que La Fondation Marcelle et Jean Coutu ait l’intention de déposer 21 millions d’actions à des fins de rachat aux termes de l’offre. Du point de vue de la saine gouvernance, plusieurs y voient un conflit d’intérêts, le conseil d’administration favorisant la Fondation de M. Coutu. D’autres m’ont mentionné qu’il ne s’agissait pas d’un vrai rachat.

Franchement, je ne vois pas là un gros problème, car sur le plan financier, cela ne change pas grand-chose. L’important c’est que la société rachète ses actions et les annulle, réduisant ainsi d’autant son nombre d’actions en circulation.

Il est vrai qu’un gestionnaire professionnel ayant 10 millions d’actions en portefeuille et voulant profiter de l’offre, sera frustré parce qu’il ne pourra que vendre une petite partie des titres qu'il détient. Il peut toujours vendre dans le marché (le titre est à 18,39$).

Bonne utilisation du capital?

La direction utilise-t-elle le capital d'une bonne manière? «Est-ce que quelqu'un va protester haut et fort contre le gaspillage des liquidités de la société pour racheter des actions à fort prix?», écrit un lecteur sur mon blogue.

Le rachat et le versement du dividende coûteront 500M$. C’est beaucoup d’argent, j’en conviens. Mais je ne crois pas qu’on puisse affirmer que c’est un «dilapidage» de capital, comme l'écrit le lecteur. On peut dire que le prix payé pour ces actions est trop élevé, ce qui est possible, mais cela demande une évaluation approfondie.

Par contre, reste qu’au moins l’argent se retrouvera dans les poches de ses actionnaires.

La direction aurait pu prendre cet argent et faire une acquisition insensée aux États-Unis et pouf!, le capital serait disparu…C’est ce qu’elle a fait il y a quelques années.

Garder le capital n’est pas sage pour la très grande majorité des sociétés parce que les dirigeants sont de piètres acheteurs.

Ce qui devrait le plus inquiéter

Ce qui m’ouvre la porte pour parler du plus grand risque, de la plus grande incertitude concernant le Groupe Jean Coutu : d’où viendra sa croissance.

La société a augmenté ses bénéfices depuis quelques années, ce qui explique la bonne performance de son titre. Toutefois, son chiffre d’affaires stagne étant à 2,7 milliards de dollars en 2012 et en 2013 et devrait demeurer à ce niveau jusqu’en 2015, selon l’analyste Peter Sklar, de BMO Marchés des capitaux.

Lisez aussi la chronique de François Pouliot Jean Coutu: fin de suspense, début d'un autre

Il n’y a rien de mal à cette situation, sauf qu’il faut être conscient que l’absence de croissance interne signifie une évaluation plus basse. Et de la pression provenant de bien des endroits pour tenter de fouetter la croissance. C’est là que le danger augmente.

J’ai vu par exemple que Jean Coutu pourrait retourner aux États-Unis. Si j’étais actionnaire, j’aurais des frissons d’horreur en lisant cela. On parle aussi de faire des acquisitions comme Pro Doc, fabricant de médicaments génériques. Cette dernière a été un succès, mais en continuant dans cette voie vers l’intégration verticale, Jean Coutu changerait son modèle d’affaire. Ce qui implique des risques accrus à bien des niveaux.

Est-ce que la direction et le conseil peuvent accepter le fait que la chaîne est devenue une société mature, générant beaucoup d’argent?

Je ne sais pas, maisl la réponse à cette question déterminera en grande partie l’avenir du Groupe Jean Coutu.

Bernard Mooney

 

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