Le surprenant dollar US

Publié le 05/11/2014 à 09:13

Le surprenant dollar US

Publié le 05/11/2014 à 09:13

Photo: Shutterstock

Lorsque je me suis aperçu qu’il fallait maintenant 1,14$ canadien pour acheter un dollar américain, je me suis rappelé l’automne 2005.

Si vous trouvez cela curieux, vous avez raison car le premier réflexe aurait dû être de faire le parallèle avec le sommet de la fièvre des ressources naturelles en 2008.

Pourtant, c’est 2005 qui m’est revenu en tête, en particulier l’après-coup du puissant ouragan Katrina qui avait ravagé la Nouvelle-Orléans. Pourquoi? Parce que plusieurs y voyaient la confirmation du déclin des États-Unis et évidemment de sa devise dans une planète en profond changement (j’ai même lu, dans le courrier des lecteurs de La Presse, que Katrina était «une punition divine contre les méchants Américains…»).

Il y avait eu les attentats terroristes de 2001, l’éclatement de la bulle techno et la récession de 2002 qui avaient touché beaucoup plus les États-Unis que le reste du monde et la montée vertigineuse des pays émergents, menée par la Chine.

Katrina, en 2005, était comme la cerise sur le sundae du déclin, un peu comme si la nature confirmait les verdicts macro-économique et géopolitique.

Ce qui a lancé de nombreux débats concernant la devise qui devrait remplacer le dollar américain. Pour les «gold bugs» et tous ceux qui prédisent le déclin économique de notre planète et de notre civilisation (certains depuis 40 ans), la réponse était évidemment l’or. Pour d’autres, la devise chinoise était le choix logique alors que d’autres favorisaient l’euro ou encore un panier de plusieurs devises.

Peu importe l’option, il était évident que le dollar américain était condamné (je l’ai même entendu, comme si c’était une évidence, de la bouche d’un chroniqueur sportif montréalais bien connu).

La crise financière de 2008-09 a, disons, rebrassé les cartes géopolitiques et tout ce que je viens d’écrire semble vraiment loufoque.

Si vous oubliez le discours des penseurs pour regarder la réalité économique, vous constatez que le dollar US n’a jamais vraiment été menacé. Malgré que l’économie américaine ne représente plus que 22% de l’économie mondiale, contre 32% en 1946, 75% des transactions commerciales internationales se font encore en dollars américains.

Même en tenant compte de toutes les faiblesses de la situation américaine, son dollar conserve des attributs qui le mettent dans une classe à part, comme sa liquidité et son omniprésence. Aucune autre devise n’a été accumulée par autant de pays de façon aussi importante.

Par ailleurs, la force du dollar américain depuis quelques mois reste surprenante. Avec des taux déprimés, une croissance économique ordinaire et l’absence de pression inflationniste, la devise US ne devrait pas s’apprécier. Sauf que le monde des devises en est un de relativité. L’économie américaine ne brille pas, mais elle se débrouille mieux que bien d’autres, comme le Canada, actuellement.

De plus, la banque centrale américaine a pris les devants avec ses mesures d’accommodation, allant très loin. Or, d’autres banques centrales, comme celle du Japon, l’imitent, ce qui déprime leur devise pendant que les États-Unis commencent à mettre la pédale douce.

Tout cela ajoute à l’attrait actuel du dollar américain et explique son appréciation. Je dis «actuel» parce que le contexte peut changer assez rapidement.

Reste que ceux qui ont misé sur l’effondrement de la devise US ont pris leurs rêves pour la réalité. Ce n’est pas pour demain.

Bernard Mooney

P.S. En passant, Katrina avait été vu aussi comme une autre confirmation que le climat était bouleversé. Or, depuis, les ouragans de cette envergure ont brillé par leur absence…BM

Blogues similaires

Canada Goose : le coup de froid

Édition du 26 Janvier 2019 | François Pouliot

CHRONIQUE. Le Canada a bon nom à l'étranger. Utilisons-le pour tenter de donner du levier à nos produits. Bonne ...

Shopify: prochaine victime de la malédiction boursière canadienne?

BLOGUE INVITE. Shopify est-elle différente des Nortel, Research in Motion, Valeant, Barrick Gold et autres?

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.