Décoder le langage des analystes

Publié le 02/12/2014 à 09:39

Décoder le langage des analystes

Publié le 02/12/2014 à 09:39

[Photo : Shutterstock]

J’ai eu plusieurs demandes de lecteurs concernant le travail des analystes. Ils s'interrogent entre autres sur la façon dont ils doivent interpréter les recommandations des analystes et tout le jargon financier qui les accompagnent.

Avant de vous donner ma vision de leur travail, voici un coup d’œil sur leur jargon.

Par exemple, la semaine dernière, plusieurs analystes ont mis à jour leur recommandation à l'égard d'Alimentation Couche-Tard (Tor., ATD.B). Chez Banque Scotia, Couche-Tard se voit attribuer la recommandation «Sector Outperform», ce qui signifie que le titre, selon l’analyste, devrait faire mieux que son secteur. Le cours cible de l’analyste sur un an est de 43$, soit une appréciation potentielle de 8,3% par rapport au cours au moment du rapport.

Financière Banque Nationale a de son côté une recommandation de «Outperform» avec une cible de 43$, ce qui est identique à Scotia. Du côté de BMO, la recommandation est la même avec un cours cible de 2$ de plus, soit 45$.

Les analystes ont parfois des problèmes avec leurs cours-cible pour ces titres qui performent si bien. Par exemple, Raymond James a une recommandation de «Outperform» pour Dollarama avec une cible de 55$, ce qui donne un rendement potentiel assez faible quand on sait que le titre se transigeait à 53,81$ au moment de la publication du rapport de l’analyste.

Si vous avez un cours-cible de 50$ sur un titre dans un horizon temporel de 12 mois et que ce titre explose à 54$ quelques semaines plus tard, vous avez le choix de ne rien faire et de laisser dépasser votre cours-cible, ou de ramener votre cible près du cours actuel en Bourse, le plus souvent à un niveau un peu plus élevé.

En passant, les cours-cible des analystes financiers sont pour moi de la décoration financière. Ils sont peu utiles lorsque vous investissez avec un horizon de plusieurs années. Ils ne servent en fait qu’à évaluer l’optimisme relatif de l’analyste.

Si vous voulez en savoir plus sur la définition des recommandations de la firme de courtage, vous devez consulter les notes relatives à la divulgation. Chaque rapport en a au moins une couple de pages à la fin et une lecture vraiment plate, dois-je vous avertir. Par exemple, chez Raymond James, la recommandation «Outperform» signifie que le titre fera mieux que l’indice de référence, soit le S&P/TSX au Canada et le S&P 500 aux États-Unis. Sa recommandation «Strong Buy» signifie que l’analyste s’attend à un rendement total d’au moins 15% d’ici les six prochains mois tout en surpassant le S&P/TSX.

Chez BMO, la recommandation «Strong Buy» n’existe tout simplement pas alors que Scotia a la recommandation «Focus stock», qui représente la meilleure idée de l’analyste. La même chose chez la Financière Banque Nationale, où la meilleure recommandation est «rendement supérieur», traduction du «Outperform».

Il est donc préférable d’avoir une bonne idée des nuances de chaque firme pour mieux interpréter ces recommandations. D’ailleurs, je vous dirais que la valeur d’un analyste n’est pas dans ce genre de recommandation. C’est davantage dans son analyse de l’entreprise, de ses forces et faiblesses, ainsi que de de son potentiel. C’est cela qui devrait attirer votre attention, et les différences dans l’interprétation des analystes pour une même société.

Il ne faut jamais non plus perdre de vue que les analystes sont biaisés. Ainsi, ils sont prédisposés à recommander ou à voir de façon plus positive les sociétés qui rapportent à leur firme, par exemple en faisant des financements. C’est une réalité de la vie financière.

De plus, méfiez-vous de la fausse précision: l’analyste qui prévoit une croissance des bénéfices de 13,4% pour l’an prochain vous lance de la poudre aux yeux. Il serait plus honnête d’écrire «entre 10 et 15%».

Enfin, recherchez les extrêmes: l’analyste qui a une recommandation d’achat fort (drôle d’expression, n’est-ce pas?) ou une si rare recommandation de vente a une meilleure chance d’avoir raison que celui qui appose celle de «conserver», qui ne veut pas dire grand-chose. Même s’il n’a pas nécessairement raison, sa vision et ses arguments auront le grand mérite de vous faire réfléchir sur votre placement.

Bernard Mooney

 

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