Voici pourquoi les fabricants d'automobiles ne lâcheront pas le moteur à essence de sitôt

Publié le 25/07/2018 à 09:26

Voici pourquoi les fabricants d'automobiles ne lâcheront pas le moteur à essence de sitôt

Publié le 25/07/2018 à 09:26

La technologie VC-Turbo de Nissan. (Photo: Nissan)

Vu du Québec, l’électrification des transports n’arrivera jamais assez tôt. Un après l’autre, ces 10 dernières années, les gouvernements ont cependant dû réduire leurs cibles de conversion du pétrole vers les électrons, car l’industrie automobile ne suit pas du tout la cadence.

Et comme on peut l’imaginer, même les cibles que cette dernière se fixe elle-même ne sont, quand on gratte un peu, que de la poudre aux yeux dans bien des cas.

Pour reprendre la boutade d’un collègue croisé la semaine dernière lors de la présentation aux médias par Nissan Canada de son nouvel Infiniti QX50, un VUS de milieu de gamme qui devrait rapidement devenir le plus gros vendeur de cette marque un peu plus luxueuse : vous avez cru Volkswagen tout ce temps à propos de sa technologie diesel, êtes-vous prêts à croire le groupe allemand maintenant qu’il se découvre des atomes crochus avec Hydro-Québec?

La même question vaut pour l’ensemble de l’industrie. À la mi-janvier, Hiroto Saikawa, PDG de Nissan, a déclaré que «tous les nouveaux modèles Infiniti lancés après 2021 seront soit des véhicules tout-électriques, ou auront la technologie ePower», du nom de la motorisation hybride, branchable ou pas, développée par Nissan.

Ce qu’on a appris entre les branches, à Toronto la semaine dernière, c’est qu’il fallait lire entre les lignes de cette affirmation. Par «nouveaux modèles», on ne parle pas de modèles déjà existants qu’on renouvellera dans trois ou quatre ans. Et Infiniti exclut d’emblée les VUS.

En d’autres mots : en 2022 au plus tôt, Infiniti aura sans doute une ou deux nouvelles voitures hybrides ou électriques à offrir, à un volume de production ne comptant pas pour plus de quelques pourcents de ses ventes totales.

À ce même moment, les analystes tablent sur des ventes annuelles de véhicules électriques légèrement supérieures à 100 000 exemplaires au Canada, sur des ventes totales dépassant les 2 millions de véhicules. C’est à peine 5% du marché.

20 ans de dur labeur

Sous le capot du QX50 se trouve une cylindrée qui mérite d’être étudiée de plus près. Parce que, d’abord, c’est ce même moteur turbo à quatre cylindres qui animera la plupart des véhicules «ePower» cités ci-haut. Ensuite, c’est qu’elle est le fruit de pas moins de 20 ans de R-D au sein du groupe Nissan, nous assure Kyle Wierzbicki, directeur du marketing pour Infiniti Canada.

QX50

Quand on investit 20 ans de recherche sur un projet, on ne le jettera pas à la poubelle à la première occasion. Ça illustre la lenteur du changement dans une industrie automobile qui pense (et qui investit) en décennies, alors qu’elle devrait penser en années. C’est après s’être délestée de ses lourdes obligations financières, via sa faillite de 2009, que General Motors a pu effectuer le revirement qui le positionne aujourd’hui aux avant-postes de l’électrification. Avant 2008, la Volt n’était qu’un petit projet de R-D parmi tant d’autres…

La cylindrée du QX50, donc, est un quatre cylindres doté de ce que Nissan appelle sa technologie «VC-Turbo», pour «variable compression and turbocompression». Nissan a ajouté entre le vilebrequin dictant la course des pistons et la bielle qui le commande une poulie asymétrique actionnable à distance. Selon la pression du pied sur l’accélérateur, on peut faire varier le niveau de compression de 8:1 à 14:1, ce qui permet, au besoin, de solliciter davantage le turbo, pour un gain de couple, ou de réduire la consommation sans trop pénaliser la puissance.

Infiniti est la première à mettre cette technologie en marché, mais elle fait rêver plus d’un constructeur depuis des décennies… Et si elle semble plus à l’aise sur des boulevards de banlieue ou des routes dont la limite de vitesse est de 80 km/h, plutôt que dans la valse d’arrêts et décollages des rues du centre-ville ou même sur l’autoroute, elle a au moins le mérite de réduire de près de 10% la consommation moyenne de ce véhicule.

Les automobilistes urbains friands de VUS de luxe

C’est important de le mentionner, car les chiffres de ventes au Canada sont éloquents à ce sujet : les VUS sont en demande croissante, surtout grâce à une demande qui grandit encore plus vite pour des VUS de luxe de la trempe du QX50. Demande qui se concentre surtout… en ville, où ces véhicules ne sont pourtant pas les plus à l’aise.

Avec un peu de chance, le moteur VC-Turbo fera oublier le V6 que Nissan utilise à toutes les sauces depuis tellement de générations de ses voitures et VUS qu’on en oublie l’âge exact. Une petite cylindrée turbo, c’est mieux.

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Reste maintenant à faire remarquer à Nissan que Honda n’a pas connu beaucoup de succès avec son interface multimédia à deux écrans, à bord de ses véhicules commercialisés ces cinq dernières années. Il n’est pas trop tôt pour faire marche arrière de ce côté-là non plus…

Les frais de déplacement pour ce reportage ont été payés par Nissan Canada.

 

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À propos de ce blogue

Autrefois, on appelait ça de l'électronique mais de nos jours, les nouvelles technologies vont bien au-delà des transistors et des circuits imprimés. Des transactions bancaires à l'écoute en rafale d'émissions de télé les plus populaires, la technologie est omniprésente. Et elle comporte son lot de questionnements. Journaliste spécialiste des technologies depuis bien avant l'avénement du premier téléphone intelligent, Alain McKenna a observé cette évolution sous tous ses angles et livre ici ses impressions sur le sujet.

Alain McKenna
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