Le plus gros potentiel d'Hydro-Québec n'est plus dans ses barrages

Publié le 30/08/2017 à 16:00

Le plus gros potentiel d'Hydro-Québec n'est plus dans ses barrages

Publié le 30/08/2017 à 16:00

Qu’il s’agisse de mobilité, de finance, de technologie, de sécurité, de domotique ou d’administration publique, tous ces secteurs ont surtout besoin d’une chose pour assurer leur avenir: d’énergie. Beaucoup d’énergie!

On dit souvent d’Hydro-Québec que c’est le bas de laine des Québécois(es). À juste titre, la société d’État est certainement le joyau de toutes les sociétés d’État de la province. C’est même généralement elle qu’on pointe du doigt quand on veut excuser le taux d’endettement élevé du gouvernement provincial : si jamais ça va vraiment, mais vraiment mal, on pourra toujours la privatiser et tout rembourser, entend-on parfois dire.

Hydro-Québec nous le répète chaque fois qu’on accroche un de ses porte-parole, son rôle, c’est de produire de l’énergie. Point barre. La voiture électrique? Nah. Les centres de mégadonnées? À d’autres. Les systèmes de gestion d’énergie connectés résidentiels, commerciaux ou même industriels? Vous êtes fous!

En d’autres mots, pas de R-D farfelue dans les centres de recherche d’Hydro-Québec. La croissance est organique, au Québec, et avec un peu de chance, elle se fera aussi à travers des partenariats avec les provinces et les États limitrophes. Une telle entente est d’ailleurs en train d’être mise en place avec l’Ontario, à condition que les deux parties s’entendent sur le prix de l’énergie fournie.

Pourtant, comme le dit l’adage, en 2017, toute entreprise est avant tout une entreprise technologique. Pourquoi pas Hydro-Québec? 

Des technologies plus énergivores que jamais

Par chance pour Hydro-Québec, l’énergie n’a jamais été tant demandée. Et elle le sera de plus en plus, à mesure que les technologies émergentes prennent de l’expansion. L’énergie propre, surtout. Celle qui fait qu’une voiture électrique est moins polluante qu’une voiture à essence, quand on inclut également l’énergie exigée pour la produire et la source même de cette énergie.

Évidemment, l’électrification du transport est un sujet très en vue ces jours-ci, surtout au Québec, avec la Loi 104, surnommée Loi zéro émission, et avec le Réseau électrique métropolitain (REM). Le Québec n’est pas seul à vouloir électrifier ses moyens de transport : la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne comptent interdire les moteurs thermiques dans les voitures d’ici 25 ans.

L’intelligence artificielle est un autre sujet populaire à Montréal. Comme à Toronto, à Edmonton, à New York et San Francisco, et partout ailleurs sur la planète. Pour bien fonctionner, les algorithmes d’apprentissage machine ont besoin d’une chose : des mégadonnées. Celles-là sont hébergées dans des mégacentres comme ceux d’Amazon et OVH, entre autres, qu’on trouve déjà au Québec. Encore là, l’IA n’en est qu’à ses premiers balbutiements.

Le bitcoin et la «chaîne de blocs» (ou blockchain) promettent de révolutionner la finance, le droit et le commerce, entre autres. On ne sait pas encore si ce sera le cas, mais à en juger par l’émergence soudaine des premières émissions de cryptomonnaie (les fameux «ICO», une façon d’amasser de l’investissement via l’émission d’une monnaie virtuelle que peuvent acheter les intéressés), l’intérêt est probablement là pour durer. Pour garantir la viabilité de ces monnaies, il faut attester les transactions à partir de systèmes informatiques sans cesse plus imposants. On prédit que le Bitcoin consommera autant d’électricité que le Danemark d’ici 2020.

Les objets connectés et les villes intelligentes sont deux autres phénomènes qui prennent de plus en plus d’ampleur. Les deux sont d’ailleurs reliés, puisqu’il faut rendre le mobilier urbain «intelligent» (et donc, électrifié et connecté) si on souhaite mieux endiguer la circulation à l’heure de pointe, la gestion de l’éclairage tout au long de l’année, l’efficacité des systèmes d’urgence 24 heures par jour, toutes les semaines.

Si on se fie au Conseil mondial de l’Énergie, qui a fait le calcul à la fin de l’année dernière, toute cette effervescence fera doubler la consommation d’électricité sur la planète d’ici 40 ans. C’est le même rythme de croissance de la demande que ces 40 dernières années, à l’exception près que cette fois, le pétrole y jouera un rôle décroissant, et les sources renouvelables, comme le solaire, l’éolien et l’hydroélectrique, un rôle majeur.

À quand un fonds québécois axé sur l’énergie?

En passant en revue les fonds d’investissement québécois qui touchent à ces secteurs, on se rend compte d’une chose : un super fonds englobant l’ensemble de ces activités, destiné à développer des technologies susceptibles d’aider Hydro-Québec à acquérir une nouvelle clientèle, serait certainement une idée lumineuse.

Pensez à Teralys Capital, un gigantesque fonds de fonds québécois qui en est actuellement à sa deuxième ronde d’investissement. Les deux rondes diffèrent légèrement dans leur orientation, mais toutes deux ciblent les technologies de l’information, les sciences de la vie et l’innovation verte.

Imaginons un instant que Jacques Bernier, qui dirige de Teralys Capital (dont les principaux bailleurs de fonds sont la Caisse de dépôt et placements du Québec, Investissement Québec et le Fonds de solidarité FTQ), prenne un café avec Éric Martel, PDG d’Hydro-Québec.

Imaginons ensuite qu’ils discutent de la création d’une nouvelle ronde de financement axée sur le développement de technologies émergentes, innovatrices, mais nécessitant une source d’énergie renouvelable comme celle que peut offrir la société d’État. Ce serait une belle façon d’accroître les revenus autrement qu’en misant sur la consommation résidentielle et industrielle traditionnelle…

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À propos de ce blogue

Autrefois, on appelait ça de l'électronique mais de nos jours, les nouvelles technologies vont bien au-delà des transistors et des circuits imprimés. Des transactions bancaires à l'écoute en rafale d'émissions de télé les plus populaires, la technologie est omniprésente. Et elle comporte son lot de questionnements. Journaliste spécialiste des technologies depuis bien avant l'avénement du premier téléphone intelligent, Alain McKenna a observé cette évolution sous tous ses angles et livre ici ses impressions sur le sujet.

Alain McKenna
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