Fermeture du Campus Ubisoft

Publié le 03/09/2009 à 00:00

Fermeture du Campus Ubisoft

Publié le 03/09/2009 à 00:00

Par Denis Lalonde

Le Campus Ubisoft, qui offre des formations de niveau collégiales et universitaires pour l'industrie du jeu vidéo, fermera ses portes dans sa formule actuelle en juin 2010 et sera remplacé par un programme qui reste à définir.

Le campus situé rue Notre-Dame Ouest à Montréal fermera donc ses portes et les cours seraient offerts dans les locaux des établissements d’enseignements associés au projet, notamment les Cegeps de Limoilou, de Matane, du Vieux-Montréal, de Dawson et de Bois-de-Boulogne de même qu'à l’Université de Sherbrooke.

Les sociétés québécoises de l’industrie du jeu vidéo sont d’ailleurs conviées à une rencontre avec le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) et le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation (MDEIE) le 11 septembre. Les ministères dévoileront à ce moment où en est le projet de mise en place d'un centre de formation en «créativité interactive».

Ce sera le moment pour les studios de jeu vidéo québécois de donner leur opinion sur le programme qui leur sera proposé.

«La mission éducative du centre sera axée sur la créativité artistique en faisant appel non seulement aux nombreuses compétences des partenaires du milieu de l'éducation, mais aussi à celles des acteurs des milieux industriel et universitaire», révèle un document gouvernemental dont LesAffaires.com a obtenu copie.

Depuis janvier 2008

Le MELS, le MDEIE et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), en collaboration avec les entreprises et les intervenants du secteur multimédia, travaillent ensemble depuis janvier 2008 afin de façonner le programme qui prendra la relève du Campus Ubisoft, dont le mandat arrive à échéance l’été prochain.

Québec se dit confiant que ce projet répondra de la meilleure façon possible aux besoins de l'industrie du multimédia tout en comptant sur l'apport des intervenants privés et publics du milieu.

«Les ministères impliqués travaillent sur quelques propositions. C’est la fin du Campus Ubisoft actuel et il faudra voir si la proposition du gouvernement saura satisfaire les besoins de main-d’œuvre de l’industrie du jeu vidéo, qui demeurent importants», explique une source de l’industrie des technologies de l’information qui a demandé l’anonymat.

Selon cette source, les programmes de formations actuels permettent de former une main-d’œuvre prête à faire son entrée sur le marché du travail. «Toutefois, ce qui fait la force d’une industrie, c’est sa main-d’œuvre d’expérience. Le nouveau programme d’éducation devra relever le défi d’un enseignement de niveau supérieur», dit-elle, ajoutant qu’il faut axer davantage de jeunes vers les formations universitaires en informatique, notamment au niveau de la programmation en physique et en intelligence artificielle. «L’offre est là, mais la relève n’est pas au rendez-vous», dit-elle.

Le directeur général d’Eidos Montréal, Stéphane D’Astous, abonde dans le même sens, affirmant qu’il s’agit d’une situation qui ne s’applique pas qu’aux jeux vidéo, mais affecte aussi d’autres industries, notamment au niveau de la sécurité.

«Il faut mettre l’accent sur une formation de niveau supérieur dans tous les corps de métier ou cela s’applique», dit-il.

Le directeur général d’Electronic Arts (EA) Montréal, Alain Tascan, affirme qu’Ubisoft a lancé quelque chose de formidable il y a cinq ans, mais que les besoins de l’industrie du jeu vidéo ont grandement évolué depuis: «Le spectre est plus large aujourd’hui et s’étend du téléphone cellulaire à la console de nouvelle génération, sans compter le Web, les applications et tout le divertissement interactif», dit-il, estimant que l’évolution des contenus nécessite une expertise de plus haut niveau.

M. Tascan est d’avis que plus les métiers sont sophistiqués, plus il est important de posséder un bagage technique de design et d’expertise scientifique pour maîtriser tous les processus de production: «Montréal s’est positionnée au cours des 10 dernières années comme un producteur de jeux de haute qualité. Pour que l’industrie de la métropole continue de produire à ce niveau et demeure compétitive à l’international, il va falloir que l’enseignement s’adapte rapidement à la nouvelle donne du progrès technologique», dit-il.

Le dirigeant d’EA Montréal affirme lui aussi que l’industrie a besoin d’experts à tous les niveaux possédant une formation universitaire: «Actuellement, on recrute ces employés à l’international. À l’intérieur du nouveau programme, il faut s’assurer d’offrir un enseignement supérieur qui va permettre au talent local de se mettre au même niveau que celui qui nous vient de l’extérieur du pays», dit-il.

Les attentes de l’industrie

La formation universitaire sera donc au cœur des discussions entourant la mise en place du nouveau programme de formation. «L’industrie du jeu vidéo est un succès au Québec. L’arrivée de Funcom en est la preuve. Quelles sont les raisons à la base de ce succès: le talent, la formation et le soutien du gouvernement. Comment faire pour que, d’ici 5 à 10 ans, non seulement nous conservions nos acquis, mais nous continuions à nous améliorer? Tout passe par une formation plus poussée. Il ne s’agit pas seulement d’un avantage de coûts et de subventions», ajoute M. Tascan.

«Nous avons déjà soumis nos attentes par rapport à la création de cette nouvelle école et nous allons écouter ce que les ministères qui pilotent le projet ont à suggérer le 11 septembre», raconte Stéphane D’Astous.

Ce dernier aimerait que cette école dite nationale puisse répondre non seulement aux besoins des studios de jeux vidéo mais aussi à ceux de tous les clients potentiels qui sont responsables de générer du contenu digital.

«De plus, le jeu vidéo sur téléphone cellulaire a été trop longtemps ignoré. Il y a des spécificités dans les différents langages de programmation qui évoluent plus rapidement que les consoles à certains égards dans ce domaine. Il faut prendre en considération cette industrie qui est aussi très importante à Montréal», ajoute M. D’Astous.

Le dirigeant d’Eidos Montréal croit également qu’il faut faire des vérifications et cibler les risques de pénuries qui pourraient survenir dans certains métiers sur une période de deux à cinq ans. À son avis, il faut s’assurer que l’alignement de la formation tienne davantage compte des risques de pénuries, ce qui n’est peut-être pas le cas actuellement.

Un intérêt des universités

Alain Tascan soutient que les universités commencent à s’intéresser à l’industrie du jeu vidéo, entre autres pour la formation des ingénieurs. Toutefois, il faut aussi selon lui des programmes universitaires qui répondent aux besoins de l’industrie dans les secteurs artistique, du design et de la gestion. «Les plus importantes entreprises du secteur font front commun dans ce dossier. Nous sommes en compétition, mais nous avons des besoins similaires pour assurer notre croissance et la pérennité de nos studios. Nous attendons de voir ce que le gouvernement a à nous offrir», dit-il

Ubisoft n’a pas voulu commenter sur l’après Campus Ubisoft. Le directeur des communications de l’entreprise à Montréal, Cédric Orvoine, préfère attendre que le nouveau projet de formation soit plus avancé avant d’accorder des entrevues à ce sujet.

 

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