Jeu vidéo : l'industrie québécoise au plus fort

Publié le 14/08/2009 à 00:00

Jeu vidéo : l'industrie québécoise au plus fort

Publié le 14/08/2009 à 00:00

Par François Rochon

Au point où ce qui semblait inaccessible il y a quelques années est devenu réalité : le Québec, avec ses quelque 6 700 emplois dans ce secteur, est devenu l'un des principaux pôles mondiaux du jeu vidéo.

" La crise a secoué tout le monde, mais elle a été moins violente au Québec. Elle nous a permis de constater l'occasion que représente le Québec pour l'industrie mondiale du jeu vidéo ", affirme Alain Tascan, vice-président et direceur général d'Electronic Arts Montréal.

Les studios de la province comptent maintenant parmi les plus prolifiques du monde. Sur les 10 titres les plus attendus en 2009, au moins trois sont de conception québécoise (Army of Two 2, Assassin's Creed 2 et Wet).

Et ce n'est qu'un début. " En ce moment, il doit y avoir entre 10 et 15 jeux vidéo de haut niveau en développement à Montréal, estime Stéphane D'Astous, directeur général d'Eidos. Il n'y a pas beaucoup d'endroits dans le monde où il s'en développe autant en une année ! "

Ces succès pourraient favoriser d'autres investissements. Selon plusieurs sources, au moins deux autres multinationales - dont un important éditeur japonais - songent très sérieusement à ouvrir des studios dans la métropole québécoise au cours des prochains mois. Un de ces studios préférerait d'ailleurs Montréal à Toronto.

De quoi faire oublier qu'Ubisoft a récemment fait savoir qu'elle ouvrirait un studio à Toronto ? " On critique souvent Québec, mais il faut applaudir le programme québécois du jeu vidéo, qui a vraiment su créer une industrie prédominante ", croit Stéphane D'Astous.

Le programme québécois de crédits d'impôt pour la production de titres multimédias, introduit en 1997, a rapidement plu à Ubisoft (France), Electronic Arts (États-Unis) et Eidos (Angleterre), et a contribué à créer environ 6 700 emplois en 10 ans. C'est ce programme, jumelé à l'offre de formation professionnelle et d'une expertise locale en animation numérique, reconnue grâce à des sociétés comme Softimage, qui a donné forme à l'industrie québécoise du jeu vidéo.

Des superproductions montréalaises

Le studio d'Eidos à Montréal, qui compte 250 employés, tourne à plein régime. C'est que l'entreprise, affiliée au géant japonais Square Enix depuis mai dernier, devrait lancer sous peu Deus Ex 3, un ambitieux jeu de rôles mêlant stratégie et action.

" Le jeu vidéo a sans doute été le secteur du divertissement le moins touché [par la crise] ", estime M. D'Astous, d'Eidos.

On se refuse à donner une date de lancement officielle du nouveau jeu, mais l'opération devrait se solder par la création d'une centaine d'emplois, voire plus. " Square Enix est très intéressée par le studio montréalais, et de nouveaux investissements devraient suivre ", assure cet ancien d'Ubisoft.

Du côté d'EA Montréal aussi, on continue de parler de croissance. La société a pourtant dû fermer des studios à Vancouver l'hiver dernier, mettant au chômage 800 personnes. " On a consolidé à Vancouver, mais on continue d'investir à Montréal ", assure M. Tascan.

Le budget d'un film américain

Un jeu vidéo de haute qualité demande deux ou trois ans de travail à temps plein à une équipe de dizaines ou de centaines de personnes. Et un investissement de quelques dizaines de millions de dollars. Si le jeu en question est un succès, il peut générer des revenus de l'ordre de la centaine de millions de dollars.

" Le budget d'un jeu typique est bien supérieur à celui de la plus grosse production du cinéma québécois ", illustre M. D'Astous. Son homologue d'EA Montréal le confirme. " On commence à comparer ça au budget d'un film américain ", dit-il. Les recettes sont du même ordre : Army of Two, édité par EA Montréal, s'est vendu à plus de deux millions d'exemplaires dans le monde, à 70 $ l'unité.

La concurrence s'intensifie

Cela explique pourquoi l'Ontario, l'Irlande et la Chine s'intéressent tant à cette industrie : un marché en forte croissance, qui génère d'importants revenus (21,3 milliards de dollars américains en 2008, selon l'Entertainment Software Alliance) et qui emploie un grand nombre de travailleurs qualifiés.

Ces pays constituent-ils un risque pour le développement de l'industrie québécoise ? " Il ne faudrait pas s'asseoir sur nos lauriers ", croit Martin Duchaîne, directeur général de TechnoMontréal, un organisme affilié à Montréal International dont le mandat est de développer l'industrie technologique montréalaise. " Montréal est déjà reconnue comme un pôle mondial du jeu vidéo, mais pour continuer à grandir, ça va prendre des efforts concertés. "

Même son de cloche du côté d'EA. " Il faut continuer d'attirer les meilleurs du monde au Québec, dit Alain Tascan. Mais si on veut poursuivre cette croissance, le gouvernement, le milieu de l'éducation et les autres partenaires devront continuer à investir. "

Cet effort ne devrait pas se résumer à des crédits d'impôt. La formation de la main-d'oeuvre, l'aide à la commercialisation et la protection de la propriété intellectuelle sont trois priorités citées tant par TechnoMontréal que par l'Alliance numérique, qui regroupe les entreprises québécoises du jeu vidéo. " Il ne faut pas être alarmiste, mentionne Pierre Proulx, président de l'Alliance. Le jeu vidéo au Québec est en santé, mais il faut en prendre soin. "

 

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