Se lancer en affaires après 50 ans

Publié le 16/02/2013 à 00:00

Se lancer en affaires après 50 ans

Publié le 16/02/2013 à 00:00

Le cholestérol stimule-t-il le goût d'entreprendre ? Si la question vous semble farfelue, vous ne connaissez pas Ghislain Prud'homme qui a créé sa première entreprise à 52 ans.

Issu d'une famille de commerçants prospères de Repentigny, M. Prud'homme a choisi de travailler dans le milieu communautaire, notamment comme coordonnateur du service à la clientèle du Chic Resto Pop. En 2010, au décès de son père, il a hérité de suffisamment d'argent pour se lancer en affaires. C'est un diagnostic de haute pression et de cholestérol élevé qui l'a tiré hors de sa zone de confort.

«Je me suis dit que, si j'avais ces problèmes de santé, c'était parce que je mangeais mal ; j'ai donc décidé de créer mon propre menu et de le vendre à d'autres», raconte l'homme de 53 ans.

Agrigourmet, qu'il a fondée en avril dernier à Montréal-Nord, cuisine des plats santé et les livre directement chez les clients. L'entrepreneur a prévu trois ans avant de se verser un salaire. Il songeait depuis plusieurs années à se lancer, mais il n'avait pas l'argent nécessaire. Grâce à son héritage, il n'a pas eu à négocier avec les banquiers.

Mononc sympathique

Avant de plonger, il a appris à faire des études de marché et à rédiger un plan d'affaires au SAJE. (En passant, oubliez le «Jeunes Entrepreneurs» ; le SAJE accompagne maintenant tous les nouveaux entrepreneurs, peu importe leur âge.) «J'étais le mononcle du groupe, mais c'était sympathique.» M. Prud'homme n'avait pas la «fraîcheur» de ses jeunes confrères, mais il avait de l'argent et de l'expérience en gestion.

Regrette-t-il de ne pas s'être lancé dans les affaires plus tôt ? «Non ! À 30 ou 40 ans, je n'étais pas rendu là.»

Il existe des différences entre se lancer dans les affaires à 30 ans et le faire à 50 ans. Mais si l'on en croit les quatre experts que nous avons interviewés, avoir 50 ans ne constitue pas une excuse valable pour renoncer à l'aventure.

Ce n'est pas Eric Dufour qui découragera les cinquantenaires de se lancer dans les affaires. De son bureau de Saguenay, le leader national en transfert d'entreprises chez Raymond Chabot Grant Thornton pense néanmoins qu'à cet âge, il vaut mieux acheter une entreprise que d'en créer une. «Il y a déjà une équipe en place.» À moins de se trouver un partenaire plus jeune.

«Il va y avoir des occasions d'achat comme jamais. À 50 ans, si on est en forme, on a encore au moins 10 à 15 bonnes années de travail devant soi. Mais comme le financement de l'acquisition d'une entreprise se fait sur un horizon de 7 à 10 ans, le nouvel entrepreneur dans la cinquantaine doit s'attendre à vivre un stress financier permanent.»

M. Dufour conseille aussi à ces personnes de s'assurer d'apporter quelque chose à l'entreprise qu'elles achètent : une expertise, un réseau, une force qu'elle n'a pas. «Attendez-vous aussi à gérer des jeunes qui n'ont pas la même mentalité que vous.»

Alain Aubut, pdg de la Fondation de l'entrepreneurship, partage cet avis : il conseille également aux 50 ans ou plus d'acheter une entreprise existante ou de se lancer avec un partenaire plus jeune. Encore mieux : achetez une entreprise existante avec un partenaire plus jeune, dit-il. «Il manquera quelque 38 000 entrepreneurs d'ici 2020 au Québec ; les occasions se multiplieront.»

Dans la colonne des moins, M. Aubut mentionne qu'il y a de nombreux programmes destinés à aider les jeunes de moins de 40 ans à démarrer leur entreprise, mais qu'aucun ne cible les 50 ans ou plus. «Par contre, si vous achetez une PME, le Fonds de solidarité FTQ, par exemple, peut se montrer très ouvert pour préserver les emplois.»

Cela dit, les nouveaux entrepreneurs de 50 ans ont souvent accumulé des économies ou de l'avoir propre, comme une maison entièrement payée, qui peuvent servir de capital de démarrage. Un apport personnel qui réduira d'autant le risque du banquier, qui sera ainsi plus enclin à oublier les cheveux gris.

«Les banquiers jugent la valeur du projet, affirme Patrick Bérard, conseiller formateur au SAJE. Si votre projet est bon et qu'en plus vous avez une expérience de gestionnaire, vous ne subirez pas de discrimination.»

«À 50 ans, vous avez de l'expérience en gestion, et si vous vous lancez dans le secteur où vous travaillez depuis des années, ça peut être très positif», dit Luc Charbonneau, associé chez Ernst & Young, qui estime que les défis de se lancer en affaires sont les mêmes à 35 ou 55 ans.

«Quand vous créez une entreprise, vous devez développer la production, le marketing, les finances, trouver des clients, etc. À 30 ou à 50 ans, c'est la même chose», croit aussi Patrick Bérard.

Par contre, il admet qu'avec l'âge, la résistance au risque n'est pas la même. «À 30 ans, si vous perdez votre chemise, vous avez le temps de vous refaire. Pas à 55 ans», croit M. Charbonneau.

«Cela dit, à cet âge, vous avez plus de maturité, vous êtes plus déterminé à réussir, vous paniquez moins vite et vous avez déjà un réseau de contacts», conclut-il.

2 % des personnes qui lancent leur première entreprise sont âgées de 50 à 59 ans. Source : Ernst & Young

83 % Pourcentage des 55 ans ou plus qui considèrent l'entrepreneuriat comme un choix de carrière désirable, comparativement à 78 % chez les 35-54 ans, d'après l'Indice entrepreneurial québécois 2012. Source : Fondation de l'entrepreneurship

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