Excellentes recommandations du comité d'experts sur la retraite

Publié le 20/04/2013 à 00:00

Excellentes recommandations du comité d'experts sur la retraite

Publié le 20/04/2013 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le système de retraite des Québécois a grandement besoin d'un traitement choc. Non seulement il protège mal les futurs retraités, mais les employeurs abandonnent de plus en plus les régimes à prestations déterminées (RPD), laissant à leurs employés la pleine gestion du risque associé à la longévité. Or, cela n'est pas vraiment cohérent avec la responsabilité sociale au sens large.

Si cette tendance n'est pas freinée, les pouvoirs publics seront bientôt les seuls à offrir cette protection à leurs futurs retraités. Les salariés du privé refuseront alors de payer aux fonctionnaires, avec leurs impôts et leurs taxes, le coût d'un avantage qui leur est inaccessible. C'en sera fait des RPD.

C'est une fatalité que veut éviter le comité d'experts présidé par Alban D'Amours, qui vient de publier plusieurs recommandations, non seulement pour sauver les RPD, mais aussi pour donner aux Québécois un levier supplémentaire afin d'affronter le risque de longévité. Leurs recommandations visent également à aider les employeurs et les salariés à combler les déficits de solvabilité (excédent du passif sur l'actif dans l'hypothèse d'une terminaison) et de capitalisation (excédent du passif sur l'actif dans l'hypothèse d'une continuité) des régimes de retraite.

Le rapport du comité d'experts, qui ont travaillé bénévolement sur les grands enjeux de notre système de retraite, est réaliste, innovateur et audacieux. Il s'adresse aux employeurs et aux salariés, mais aussi à l'État, qui est responsable d'établir le cadre légal permettant d'assurer une protection minimale pour la retraite des travailleurs et une gestion rigoureuse des régimes nécessaires à leurs besoins.

Avant d'analyser les principales recommandations du comité, voici quelques statistiques démontrant l'ampleur des défis qu'affrontent les salariés québécois. Près de 1,9 million d'entre eux (47 % du total) ne participent à aucun régime collectif de retraite. Environ 2,4 millions (61 %) ne participent pas à un RPD ni à un régime à cotisations déterminées (dont la rente n'est pas garantie). Les RPD, dont la rente est garantie, ne profitent qu'à 35 % des salariés, et près des deux tiers d'entre eux travaillent pour l'État.

La recommandation la plus innovatrice du rapport est l'introduction d'une «rente longévité», qui couvrirait 100 % des travailleurs à compter de 75 ans, lorsque les besoins financiers deviennent plus importants. Cette rente serait capitalisée à 100 % et financée par une cotisation de 3,3 % du salaire admissible, payée moitié-moitié par l'employeur et le salarié. Pour en limiter le coût, aucun autre bénéfice ne serait ajouté. Elle serait administrée par la Régie des rentes (RRQ), et les fonds seraient gérés par la Caisse de dépôt et placement. Les prestations seraient imposables. La contribution de l'employeur serait déductible, et celle du salarié permettrait un crédit d'impôt. Ajoutée aux prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Régime de rentes, la rente longévité assurerait un revenu de retraite représentant 60 % du salaire admissible aux fins des calculs de la RRQ (environ 50 000 $ actuellement).

Sauver les prestations déterminées

La deuxième grande ambition du comité d'experts est de sauver les RPD, qui offrent la meilleure protection aux retraités. Il propose que les régimes des municipalités, des universités, des centres de la petite enfance et des ambulanciers soient soumis aux mêmes règles que les régimes privés aux fins du remboursement de leurs déficits. Pour faciliter cet amortissement, on introduit pour tous les régimes la notion de «capitalisation améliorée», qui utiliserait un taux d'actualisation fondé sur le taux de rendement des obligations de sociétés de haute qualité. La notion de déficit de solvabilité disparaîtrait.

On propose aussi de donner à un employeur le droit de modifier ou d'annuler l'indexation des rentes d'un régime s'il n'a pas pu conclure avec les salariés et les retraités une entente sur le partage des risques d'un régime déficitaire après trois ans de négociations.

D'autres recommandations visent la promotion de l'épargne et le report de la retraite.

La mise en vigueur de l'ensemble des recommandations améliorerait grandement la sécurité financière de 60 % des futurs retraités qui sont les seuls à porter le risque de longévité. Puisque les régimes canadiens sont intégrés, souhaitons qu'Ottawa et les autres provinces s'en inspirent pour faire avancer ce dossier.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Le ministre Bernard Drainville veut éliminer, dans la Loi sur l'accès à l'information, un certain nombre d'entraves à la diffusion de documents d'intérêt public que des élus et des entreprises refusent de rendre publics pour des motifs souvent arbitraires et illégitimes. C'est le cas de nombreux contrats de service conclus entre les pouvoirs publics et des sociétés privées ainsi que des particuliers. La diffusion de documents publics doit être la norme, et non pas l'exception.

Je n'aime pas

Tandis que le gouvernement Marois a ouvert un chantier de travail sur le financement des garderies, la ministre Nicole Léger a fermé la porte à toute hausse du tarif quotidien à 8 $ par jour, comme le demandent deux associations de garderies et de plus en plus de parents. Ceux-ci contribuent à hauteur de 400 millions de dollars au financement des garderies à tarif réduit, alors que l'ensemble des contribuables paient 2,2 milliards de dollars. En 2004, la contribution des parents a atteint 22 % du coût du programme lorsqu'elle est passée de 5 à 7 $. Depuis, cette part a fondu à 17 % du coût total en raison du gel et de la non-indexation du tarif. Le refus de Mme Léger est insensé.

jean-paul.gagne@tc.tc

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