" Notre ambition est de devenir le Pratt & Whitney du train d'atterrissage "

Publié le 28/03/2009 à 00:00

" Notre ambition est de devenir le Pratt & Whitney du train d'atterrissage "

Publié le 28/03/2009 à 00:00

Le concepteur et fabricant de trains d'atterrissage de Longueuil entend profiter de la récession pour accroître ses parts de marché. Selon son président, Gilles Labbé, les investissements en recherche et développement réalisés au cours des dernières années procurent à Héroux-Devtek une longueur d'avance sur ses concurrents. Parmi les projets à l'étude : de possibles acquisitions et l'implantation d'activités à l'étranger.

Journal Les Affaires - En période économique difficile, l'industrie aérospatiale est toujours l'une des premières touchées. Comment la crise actuelle influe-t-elle sur votre carnet de commandes ?

Gilles Labbé - Notre carnet de commandes est en hausse, surtout du côté militaire.

Pour ce qui est de l'aviation civile, il y a davantage d'inconnues. Tout dépendra des clients des constructeurs d'avions et de leur capacité d'obtenir le crédit nécessaire au paiement des avions qu'ils ont commandés.

C'est là qu'est le gros point d'interrogation. Combien de clients de Boeing, d'Airbus ou de Bombardier ne parviendront pas à financer l'achat de leurs appareils ? Personne ne le sait.

JLA - Est-ce que cette situation a déjà entraîné des annulations, des reports ou des demandes de réduction de votre cadence de production ?

G.L. - Oui, essentiellement, du côté des constructeurs d'hélicoptères et de jets d'affaires. Les autres tiennent le coup pour le moment. Mais il ne faut pas se leurrer : la production d'appareils de plus de 100 sièges connaîtra aussi une réduction, c'est évident.

Heureusement, pour l'instant, nous n'avons pas eu à faire de mises à pied. Nous allons faire tout ce qui est possible pour éviter cela.

JLA - Comment comptez-vous y parvenir ?

G.L. - En augmentant nos parts de marché dans l'aviation civile, ce qui est possible même dans le contexte actuel.

Nous misons aussi sur notre réputation et notre bonne santé financière. Nous sommes reconnus pour notre performance et la qualité de notre service. L'industrie sait également que nous n'avons jamais cessé d'investir en recherche et développement (R-D) au cours des dernières années.

Mais ce n'est pas le cas de tous. Certains de nos concurrents ont moins bien performé, n'ont pas investi et se trouvent dans une situation financière inquiétante. Cela pourrait mener leurs clients avionneurs à regarder ailleurs, notamment dans notre direction. Voilà pourquoi nous croyons pouvoir augmenter nos parts de marché. Non pas en profitant de l'apparition de nouveaux programmes de fabrication, mais en allant arracher des mandats à la concurrence.

JLA - Le moment est également propice à l'acquisition d'entreprises. Est-ce dans vos projets ?

G.L. - Nous gardons les yeux grands ouverts. Mais je n'en dirai pas plus.

JLA - Vous parlez de vos investissements en R-D. Comment, dans un cycle baissier, êtes-vous parvenus à vous positionner dans le domaine de la conception ?

G.L. - Ça prend un peu de courage, et nous en avons !

À l'origine, on était une usine de réparation et d'entretien de pièces. Nous avons commencé à fabriquer des pièces, puis des trains d'atterrissage complets. Il était normal par la suite de passer à la conception.

Cette audace nous a donné l'occasion d'entrer en contact avec des acteurs majeurs comme Boeing et Northrup Grumman. Ça nous a permis de bâtir une équipe de R-D. Résultat : l'équipe, qui ne comptait que 20 ingénieurs au début, en compte maintenant plus de 80.

Chose certaine, ça a créé chez nous un engouement. Tellement qu'aujourd'hui, nous voulons être le Pratt & Whitney Canada du train d'atterrissage. C'est un peu devenu notre modèle d'entreprise.

JLA - Donc, vous considérez que les investissements passés vous servent bien aujourd'hui ?

G.L. - Plus que jamais. Je ne devrais peut-être pas le dire, mais nous sommes tellement occupés que nous avons dû décliner récemment un mandat de développement d'un client.

JLA - Vous semblez optimiste à l'égard du marché militaire. Pourtant, il y a eu un changement de gouvernement à Washington. Vous ne vous attendez pas à une réduction des budgets alloués à la Défense américaine ?

G.L. - À court terme, nous ne croyons pas que le gouvernement américain réduira ses dépenses militaires. D'une part, parce que les emplois dans l'industrie sont de bons emplois, bien rémunérés, ce dont ont bien besoin les États-Unis actuellement. D'autre part, parce que nous savons que le budget alloué à la Défense augmentera encore de 4 % en 2010. Ainsi, pour les deux prochaines années, il n'y a pas de raisons de s'inquiéter. Par la suite, toutefois, on risque de voir une réduction des budgets de la Défense.

JLA - Est-ce que cette situation ne vous inquiète pas ? Ne craignez-vous pas un retrait des États-Unis du développement de l'avion de chasse Joint Stright Fighter (JSF)?

G.L. - Pas vraiment. Du côté militaire, Héroux-Devtek est très concentrée dans le secteur des services. Dans le secteur des trains d'atterrissage, nous sommes les numéros un en Amérique du Nord dans les services après vente (entretien, réparation, pièces de rechange, etc.).

Le JSF, auquel nous participons, remplacera tous les avions de chasse qu'on trouve actuellement dans le monde, d'ici les 20 prochaines années.C'est vrai que les Américains sont très impliqués dans son développement. Mais il s'agit d'un programme international, auquel prennent part aussi les Canadiens, les Anglais, les Australiens, les Turcs, les Italiens et les Norvégiens, entre autres. Compte tenu de son importance stratégique, mais aussi du nombre d'acteurs engagés dans son développement, je ne crois pas que ce programme sera annulé.

JLA - Plusieurs de vos concurrents ont beaucoup investi dans les pays émergents ou à plus faibles coûts de production. Quelles sont vos intentions à cet égard ?

G.L. - Notre implantation dans des pays dits à bas coûts est à l'étude. Nous n'avons pas le choix de regarder cette voie si nous voulons demeurer compétitifs. Ce qui est sûr, c'est que si on y va, on ne le fera pas aux dépens d'une usine canadienne. Nous sommes d'avis que le savoir-faire devra demeurer dans nos usines les plus performantes au Québec et au Canada, quitte à confier des travaux plus simples dans des pays à bas coûts.

JLA - Dans quels pays pourriez-vous vous implanter ? L'Asie fait-elle partie de vos plans ?

Nous pensons au Mexique en particulier et à certains pays de l'Est de l'Europe. Mais pas encore à l'Asie. Le marché de l'aéronautique est si vaste que nous n'avons pas encore eu à nous étirer jusque-là.

Gilles Labbé, président et chef de la direction de Héroux-Devtek, était le conférencier du Rendez-vous financier Les Affaires du 19 mars dernier, à Montréal.

martin.jolicoeur@transcontinental.ca

À la une

Les profits d’Alphabet bondissent

Il y a 34 minutes | AFP

La maison mère de Google a été portée par la publicité, le cloud et l’IA.

Microsoft fait mieux que prévu au premier trimestre

Il y a 24 minutes | AFP

Dans les échanges électroniques postérieurs à la clôture de la Bourse, l’action Microsoft gagnait près de 5%.

Bourse: Wall Street plombée par Meta et la faible croissance américaine

Mis à jour il y a 44 minutes | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de New York a terminé en baisse, jeudi.