" Je veux ramener l'esprit combatif chez Cossette "

Publié le 20/02/2010 à 00:00

" Je veux ramener l'esprit combatif chez Cossette "

Publié le 20/02/2010 à 00:00

Par Diane BĂ©rard

Le 8 février dernier, Claude Lessard a présenté celui que tout le monde présume être son dauphin, Brett Marchand, le nouveau chef de la direction des opérations globales de Cossette. Les réactions n'ont pas tardé : comment et pourquoi cette agence dont le siège social se trouve encore à Québec a-t-elle pu choisir un unilingue anglophone pour diriger sa destinée ? Un commentaire qui agace Claude Lessard, mais il demeure stoïque. " Brett est la meilleure personne pour orchestrer notre expansion internationale. " Il faut dire que celui qui est toujours pdg et président du conseil de Cossette en a vu d'autres au cours des derniers mois. Bell a choisi de morceler entre trois agences le contrat que Cossette détenait en exclusivité depuis des lunes. Un autre client important, GM, a été happé par la crise de l'industrie automobile. Sans compter une crise mondiale pendant laquelle les entreprises ont sabré leurs dépenses publicitaires. Et, pour finir, le 20 juillet 2009, Cossette a été la cible d'une offre d'achat non sollicitée de la part d'un groupe dirigé par François Duffar, l'associé de la première heure de Claude Lessard. Le pdg de Cossette nous a accordé sa première entrevue exclusive depuis la saga Cosmos.

Diane Bérard - Faut-il remercier le groupe Cosmos pour son offre d'achat non sollicitée, puisqu'elle a mené à la privatisation de Cossette ?

Claude Lessard - (silence) Les remercier ? Non. Nous n'avions pas besoin de Cosmos pour prendre cette décision. La nouvelle direction, en poste depuis deux ans et demi, l'a évoquée plusieurs fois en réunion. Et Cosmos le savait, puisque George Morin, un des actionnaires du Groupe Cosmos, a fait partie de l'équipe de direction de Cossette jusqu'en 2007. Si Cossette a quitté la Bourse, c'est parce que son équipe de direction le désirait, et non à la suite de l'offre non sollicitée de Cosmos.

D.B. - En 2000, Cossette a présenté son entrée en Bourse comme une bénédiction, 10 ans plus tard, c'est sa sortie qui est une bénédiction...

C.L. - Les deux affirmations sont vraies. En 2000, lors de l'inscription de Cossette en Bourse, je savais exactement à quoi m'attendre. Mais les règles ont changé. Ce qui était une bonne affaire il y a 10 ans ne l'est plus aujourd'hui. Il fallait consacrer presque la moitié de notre temps à satisfaire les règles de divulgation. Si les règles de 2010 avaient prévalu en 2000, nous n'aurions probablement pas fait le saut en Bourse.

D.B. - Pourquoi avoir inscrit Cossette en Bourse ?

C.L. - Pour financer notre croissance internationale. Nous avions deux choix : se vendre à un groupe étranger ou aller en Bourse pour se donner les moyens de réaliser des acquisitions. Nous avons choisi le second.

D.B. - Cosmos était dirigée par votre associé de la première heure, François Duffar. En affaires, connaît-on vraiment ses associés ?

C.L. - Depuis les années 1970, Cossette a vu passer une cinquantaine d'associés. Et en 40 ans, il n'y a eu qu'une seule chicane. Cosmos, pour moi, c'est l'exception.

D.B. - Avez-vous refusé l'offre de Cosmos pour des raisons personnelles ou professionnelles ?

C.L. - Ce n'est pas moi qui ai refusé cette offre, c'est le conseil. L'offre était inéquitable pour les actionnaires. De plus, la nouvelle équipe de direction n'était pas à l'aise avec Cosmos pour acheteur. Le processus d'évaluation a été très rigoureux. Si l'offre de Cosmos avait été raisonnable, je ne m'y serais pas opposé.

D.B. - Comment vous sentez-vous maintenant que ces événements sont derrière vous ?

C.L. - Comme un médaillé olympique qui oublie d'un seul coup tous les efforts qu'il a dû faire pour gagner.

D.B. - Qu'avez-vous trouvé le plus difficile : perdre le contrat de Bell, recevoir une offre d'achat non sollicitée de votre ancien partenaire ou traverser une crise économique ?

C.L. - Tout ! Mais avec le recul, je peux vous dire que ces crises ont tout de même eu du bon : je sais ce que vaut la nouvelle équipe de direction en poste depuis mai 2007. C'est quand les temps sont durs que vous évaluez vos gestionnaires. Je peux vous dire que je ne leur ai pas donné la direction de l'entreprise, ils l'ont gagnée.

D.B. - Parlant de nouvelle direction, pourquoi avoir choisi un unilingue anglophone, Brett Marchand, comme chef des opérations de Cossette ?

C.L. - Vous pouvez parler et écrire à Brett en français, il le comprend. De plus, il suit des cours depuis deux ans pour apprendre à le parler. Pour moi, c'est important.

D.B. - Brett Marchand travaille pour Cossette seulement depuis 2005, pourquoi ne pas avoir choisi un dirigeant élevé dans la " culture Cossette " ?

C.L. - La culture Cossette évolue, elle doit s'adapter à la réalité du marché. Après un processus de deux ans, nous avons conclu que Brett était le meilleur candidat pour relever notre défi de transformer Cossette en une entreprise internationale. Il a travaillé à la fois en agence et en entreprise, et cumule plusieurs années d'expérience aux États-Unis.

D. B. - Brett Marchand est chef des opérations globales, pourquoi n'est-il pas également chef de la direction ?

C. L. - Une étape à la fois.

D. B. - Vous conservez le titre de chef de la direction, éprouvez-vous de la difficulté à lâcher prise ?

C. L. - Je n'aime pas cette expression, elle est psychologiquement, émotivement et physiquement péjorative. Je ne lâcherai jamais prise. Mais je n'aurais aucun problème à partir. Sauf que, pour l'instant, mon devoir consiste à appuyer la nouvelle direction afin qu'elle réussisse le plan stratégique qu'elle a élaboré. Il faut que je me détache du quotidien pour me concentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire les relations avec les clients.

D. B. - Vous ne voulez plus qu'on décrive Cossette comme une grande entreprise québécoise/canadienne mais plutôt comme une petite entreprise internationale. Expliquez.

C. L. - C'est une question d'attitude. Je veux ramener l'esprit combatif chez Cossette, cet esprit qu'on peut perdre lorsqu'on devient important dans son secteur d'activités. Vous ne vous comportez pas de la même façon lorsque vous vous percevez comme une grande entreprise que lorsque vous vous voyez comme le petit qui joue dans la cour des grands. Vous ne consacrez pas la même énergie à faire votre place qu'à la conserver. Cossette doit changer la façon dont elle se perçoit et retrouver ses racines entrepreneuriales. C'est la seule façon de réussir notre plan de croissance des prochaines années.

D.B. - Comment sait-on qu'une entreprise est internationale ? Par la ventilation de son chiffre d'affaires? Le nombre de bureaux à l'étranger ?

C. L. - La répartition des revenus est certainement un bon indicateur. Plus de la moitié de ceux de Cossette viendra de l'extérieur du Canada. Le nombre de bureaux étrangers n'est plus une mesure pertinente. Les entreprises centralisent de plus en plus leurs activités. Elles ont un bureau en Europe, un autre en Asie et, parfois, un autre au Moyen-Orient. Alors, puisque nos clients ont un nombre limité d'antennes étrangères, nous pourrons très bien les servir en adoptant la même structure. Ne vous attendez donc pas à ce que Cossette annonce une série d'ouverture de bureaux étrangers.

D. B. - En plus de ramener la culture entrepreneuriale, en quoi la nouvelle stratégie de Cossette tranche-t-elle avec le passé ?

C. L. - L'époque des acquisitions est révolue. Nous revenons à celle de la croissance organique. D'où l'importance de retrouver notre côté combatif.

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