" Je suis un entrepreneur dans le domaine des idées. "

Publié le 10/04/2010 à 00:00

" Je suis un entrepreneur dans le domaine des idées. "

Publié le 10/04/2010 à 00:00

Par Diane Bérard

Le 22 avril, le très exclusif club 357, de Daniel Langlois, accueillera une centaine de gens d'affaires, d'artistes et d'intellectuels, présents sur invitation seulement. Au menu : champagne, dîner gastronomique arrosé de grands crus, scotch, cigares et une conférence de Shelby Steele, un expert nord-américain des questions raciales qui parlera de l'effet Obama. La discussion se prolongera jusqu'aux petites heures, comme on le faisait jadis dans les salons européens de la " haute ". C'est ce que Rudyard Griffiths, cofondateur de cet événement intitulé Grano Series, a voulu recréer. Ce Torontois de 39 ans a aussi fondé le Dominion Institute, un think thank qui fait la promotion de l'identité canadienne. La première Grano Serie voit le jour en 2004, à Toronto. Elle se tient au restaurant Grano, une institution. Une seconde débute à Calgary, en 2007, puis à Montréal en 2008. Chaque série comporte quatre conférences par année. En 2010 s'ajoute un événement à Vero Beach, en Floride, à la résidence privée de la famille Weston. Nous avons rejoint Rudyard Griffiths à ses bureaux de Toronto.

Diane Bérard - Comment qualifiez-vous la Grano Serie, une formule particulière qui n'est pas vraiment une conférence ?

Rudyard Griffiths - C'est un " happening " intellectuel.

D.B. - Quelle est votre étiquette personnelle ?

R.G. - Je suis un entrepreneur dans le domaine des idées. Les participants de la Grano Series paient pour être stimulés intellectuellement. Mon associé, Patrick Luciani, et moi avons créé l'événement auquel nous rêvions d'assister mais qui n'existait pas.

D.B. - Vos événements ne comptent que 120 invités, et on n'y sert que ce qu'il y a de mieux, sans compter les conférenciers de prestige qu'il faut payer. Est-ce rentable ?

R.G - Oui, mais nous avons dû travailler fort au cours de la dernière année. La série de Montréal, qui existe depuis un an, nous a donné des sueurs froides. Au printemps 2009, plusieurs commanditaires du secteur financier nous ont laissé tomber. Nous avons persévéré, utilisant les revenus de la série de Toronto pour financer Montréal. Le pari a rapporté : à l'automne 2009 nous avons remplacé tous les commanditaires qui nous avaient quittés.

D.B. - Quel est votre truc pour que des conférenciers prestigieux se déplacent à Montréal pour parler à 120 personnes ?

R.G. - Nous jouons la carte de la nouveauté : ces gens-là ont l'habitude des textes 100 fois repris, nous leur offrons plutôt un saut dans le vide - une allocution sans texte - et un échange personnalisé avec des influenceurs triés sur le volet. L'idée en séduit plusieurs. Et puis, à partir du moment où quelques-uns acceptent, ils servent " d'appât " pour les autres !

D.B. - Où un intellectuel comme vous a-t-il appris la gestion ?

R.G. - Dans un organisme à but non lucratif.En 1997 j'ai démarré le Dominion Institute, un think tank destiné à promouvoir l'identité canadienne ainsi que l'engagement des Canadiens dans la sphère publique. Vous n'avez pas idéé à quel point l'univers des entreprises à but non lucratif est concurrentiel; ce n'est pas parce que votre objectif n'est pas financier que vous n'avez pas besoin d'argent ! Le Dominion Institute était soumis aux mêmes contraintes que toute entreprise en démarrage : nous avions 36 à 48 mois pour devenir rentable, sinon...

D.B. - Quelle est la plateforme idéologique du Dominion Institute ?

R.G. - Il n'y en a aucune. Notre mission est éducative : nous voulons que les Canadiens soient des citoyens engagés. C'est une mission importante, pour laquelle nous avions besoin de toute l'aide disponible. Il était hors de question de nous " peinturer dans un coin " au moyen d'une idéologie particulière, comme le font certains think thanks. Pensez à l'Institut économique de Montréal et à son idéologie de droite, ou à Maude Barlow, qui est de gauche. Dans les deux cas, quels que soient la force des arguments, le discours ne pénétrera jamais certains cercles. Cela nuit au financement, à la couverture médiatique et à l'impact.

D.B. - Quelle est votre leçon de gestion la plus importante ?

D.B. - La diversification des sources de financement. Trop d'organismes à but non lucratif comptent sur un nombre restreint de bailleurs de fond. Dès le début nous avons noué des partenariats avec plusieurs univers.

D.B. - Le mélange des genres vous tient à coeur...

R.G. - Oui. À la Grano Series, nous asseyons des financiers, des artistes et des intellectuels côte-à-côte, comme cela se fait à New York et à Paris. Nous trouvons ainsi de nouvelles solutions à nos vieux problèmes et nous développons une autre perspective des enjeux.

D.B. - Vous êtes toujours lié au Dominion Institute et à la promotion de l'identité canadienne, comment voyez-vous le Québec ?

R.G. - Je considère que la tension entre le fait français et le reste du Canada est positive et créatrice. La cohabitation n'est pas toujours facile, mais nous avons trouvé moyen de vivre avec nos différences, ce qui donne une société beaucoup plus riche que si elle était monoculturelle.

D.B. - Et que pensez-vous de notre économie ?

R.G. - Son degré de diversification fait des envieux ailleurs au Canada. L'Alberta, qui est très compétitive, voudrait bien avoir une économie aussi variée. Vous avez la culture, la technologie, les ressources naturelles. Seule l'Ontario réussit dans un nombre aussi vaste de secteurs. Mais elle est très dépendante des États-Unis, alors que le Québec me paraît plus international.

D.B. - Vos projets pour la prochaine année ?

R.G. - Démarrer des Grano Series dans les villes américaines secondaires : San Francisco, Philadelphie, San Diego, etc,

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