Un bouclier contre les risques

Publié le 27/10/2012 à 00:00

Un bouclier contre les risques

Publié le 27/10/2012 à 00:00

L'investissement responsable a grandement évolué depuis 20 ans. Autrefois réservé à une poignée d'investisseurs, ce créneau est devenu un passage obligé pour les investisseurs institutionnels. Tour d'horizon d'un secteur en pleine croissance.

L'explosion d'une plateforme de BP dans le golfe du Mexique en avril 2010 a non seulement causé une des pires catastrophes écologiques de l'histoire, mais aussi coûté très cher aux actionnaires de la pétrolière. Le titre de BP vaut 30 % de moins qu'avant l'accident.

Un événement difficile à prévoir pour les investisseurs, sauf pour les adeptes du mouvement responsable, qui se disent mieux outillés pour prévenir ce genre de danger. «Le cas BP est l'exemple parfait d'un événement prévisible», affirme Jane Ambachtsheer, associée et chef mondial en investissement responsable chez Mercer.

Le géant pétrolier britannique a connu plusieurs ratés sur le plan de la sécurité. Or, cet aspect n'a pas fait l'objet de discussions chez les analystes des institutions financières qui recourent à l'approche d'investissement traditionnelle, déplore Mme Ambachtsheer.

«On louangeait BP en la présentant comme étant la championne de la réduction des coûts. Or, ce comportement l'a amenée à diminuer ses contrôles de sécurité», soutient-elle.

Identifier les black swan

Dans le jargon financier, BP représentait un black swan, un événement improbable portant en lui un impact massif et dévastateur.

«Ce type de risque est rarement repéré par les analystes traditionnels», renchérit Robert Walker, vice-président des Fonds éthiques chez Placements NEI, un fournisseur de fonds communs détenu à parts égales par le Mouvement Desjardins et les credit union d'autres provinces du pays. «Je ne peux pas donner de garantie absolue, mais avec nos fonds, nous promettons de tout faire pour débusquer les black swan.»

Les investisseurs responsables voient dans le cas BP une preuve tangible des limites du court-termisme de la philosophie de placement traditionnelle. Une approche qui procure des rendements ajustés pour les risques inférieurs à ceux des fonds qui adhèrent aux principes de l'investissement responsable.

Paul Shrivastava, professeur à l'Université Concordia et directeur du Centre David O'Brian pour les entreprises durables, est convaincu que l'approche d'investissement responsable aide à bâtir des portefeuilles plus solides.

«Les portefeuilles responsables sont résilients face aux demandes croissantes du public investisseur et des groupes environnementaux», soutient-il.

Une révolution dans la façon d'investir

Jane Ambachtsheer, de Mercer, soutient qu'un changement de mentalité est en train de s'opérer tant dans le monde des affaires que dans l'industrie financière.

«Il y a eu la révolution industrielle, puis la révolution de l'information. Aujourd'hui, nous amorçons la révolution des ressources», dit Mme Ambachtsheer, en précisant que la raréfaction des ressources oblige ceux qui les exploitent à adopter un comportement responsable. Depuis trois ans, elle voit un nombre croissant d'investisseurs institutionnels s'engager en faveur de l'investissement responsable. Une collaboration croissante s'installe aussi entre investisseurs.

Selon cette experte, la nouvelle donne change complètement la manière dont les fonds de placement sont gérés.

«Un changement de philosophie est amorcé», dit aussi Robert Walker, de Placements NEI. Selon lui, certains investisseurs refusent même désormais de participer aux téléconférences trimestrielles sur les résultats de certaines entreprises, car la performance à court terme fait perdre de vue les objectifs à long terme d'une entreprise.

Le prix du risque

Bien sûr, si vous posez la question aux petits investisseurs, aucun ne vous dira qu'il cherche à profiter des infractions environnementales, des déversements et de l'exploitation d'enfants dont peuvent être accusées les entreprises dans lesquelles ils investissent, dit Paula Glick, directrice des relations institutionnelles chez Sustainalytics, une firme qui offre des services de recherche en investissement responsable.

«Mais il y a aussi la question de la réduction du risque qui joue en faveur de l'investissement responsable», dit-elle.

Les investisseurs responsables s'entendent sur ce point. Aujourd'hui, «pour optimiser le rendement à long terme sur votre capital, vous devez communiquer avec les entreprises dans lesquelles vous investissez. Vous devez réfléchir à la manière dont les enjeux sociaux, environnementaux et de gouvernance peuvent influencer le rendement de votre portefeuille», fait valoir Mme Ambachtsheer. «Ces enjeux conditionnent directement la capacité des entreprises à offrir une performance financière durable.»

UNE TERMINOLOGIE FLOUE, UN SEUL OBJECTIF

L'investissement responsable évolue à vitesse grand V, et la terminologie qui lui est associée s'est complexifiée au fil des ans avec la multiplication des fonds offerts. Comment distinguer investissement éthique, responsable ou socialement responsable ?

L'investissement responsable est devenu une notion générique, un fourre-tout. «Plusieurs vocables sont utilisés pour décrire ces types d'investissement», explique Paul Shrivastava, professeur à l'École de gestion John-Molson de l'Université Concordia.

Pour s'y retrouver, il faut comprendre l'histoire de l'investissement responsable. Celle-ci a commencé au Québec avec les communautés religieuses et ailleurs en Amérique du Nord avec les quakers. Selon le site de la Bourse de New York, les quakers ont instauré l'investissement responsable en 1768 en bannissant les placements dans les transactions d'esclavage.

Plus près de nous, les communautés religieuses canadiennes ont commencé à utiliser leur pouvoir d'investisseur en 1975. C'est l'époque de l'investissement éthique.

On veut éloigner les fidèles des «titres du péché». L'alcool et le tabac sont entre autres visés. En s'appuyant sur des valeurs morales, on interdit des placements dans ces sociétés. Aujourd'hui, l'investissement éthique est une sous-catégorie de l'investissement responsable.

Faire preuve de transparence

Au tournant des années 1990, «les entreprises ont fait face à des pressions croissantes pour qu'elle fasse preuve de plus de transparence en matière environnementale, sociale et de gouvernance», explique M. Shrivastava. Cette transparence s'installant, il devenait possible pour les investisseurs de sélectionner les sociétés qui se démarquaient sur ce plan. Des indicateurs furent mis au point pour évaluer la performance «morale» des entreprises. Ce sont les ESG, les indicateurs écologiques, sociaux et de gouvernance.

L'investissement responsable moderne est fondé sur les ESG. Ainsi, un investisseur responsable appliquera ou non des filtres négatifs. Il pourra ainsi choisir d'investir dans un acteur consciencieux qui évolue, par exemple, dans une industrie polluante. Il n'y a pas d'incohérence, car l'investisseur responsable peut exiger une amélioration des pratiques.

L'investissement durable est quant à lui synonyme de l'investissement responsable. Le vocable s'inspire du concept de développement durable. Idem pour l'investissement «socialement responsable». Peu importe la façon dont ces outils d'investissement sont nommés, ils visent tous le même objectif : obtenir un résultat qui va au-delà du strict rendement financier, insiste M. Shrivastava.

70 % La part de la valeur d'une entreprise qui est attribuable à des éléments intangibles en 2012. | Source : Mercer

38 G$ US Le coût cumulatif du déversement de pétrole dans le golfe du Mexique assumé par BP. | Source : The Guardian

CINQ FONDS SOCIALEMENT RESPONSABLES

Fonds d'actions valeurs sociales AGF

Ratio de frais de gestion 3,08 %

Actif sous gestion 38 M$

Rendement annuel composé sur 3 ans (au 30 sept. 2012, le S&P/TSX a gagné 8,8 %) 0,80 %

Fonds Croissance Éthique

Ratio de frais de gestion 2,41 %

Actif sous gestion 258 M$

Rendement annuel composé sur 3 ans (au 30 sept. 2012, le S&P/TSX a gagné 8,8 %) 1,00 %

Fonds ISR Summa Investors

Ratio de frais de gestion 2,74 %

Actif sous gestion 725 M$

Rendement annuel composé sur 3 ans (au 30 sept. 2012, le S&P/TSX a gagné 8,8 %) - 1,87 %

Fonds d'actions canadiennes NordOuest

Ratio de frais de gestion 2,67 %

Actif sous gestion 220 M$

Rendement annuel composé sur 3 ans (au 30 sept. 2012, le S&P/TSX a gagné 8,8 %) 5,30 %

Fonds Desjardins Environnement

Ratio de frais de gestion 2,32 %

Actif sous gestion 188 M$

Rendement annuel composé sur 3 ans (au 30 sept. 2012, le S&P/TSX a gagné 8,8 %) - 0,03 %

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