Quand l'abondance mène à l'insouciance : le cas de l'eau

Publié le 30/10/2010 à 00:00

Quand l'abondance mène à l'insouciance : le cas de l'eau

Publié le 30/10/2010 à 00:00

Tout le monde s'entend sur le fait que l'eau est précieuse, qu'elle n'a pas de prix. Alors, comment arriver à lui attribuer une valeur ?

C'est Jean-Pierre Revéret, professeur à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM, qui a mis en évidence ce paradoxe dès l'ouverture du Forum québécois sur l'eau, tenu les 26 et 27 octobre au Centre des sciences de Montréal. La remarque de l'universitaire illustre bien le défi immense que représente la gestion intelligente de la plus formidable ressource québécoise : l'eau.

Le Québec possède de 2 à 3 % des ressources mondiales d'eau douce, même s'il ne compte que 0,1 % de la population du globe. De l'eau, nous en avons en abondance, et nous ne nous en privons pas. Les chiffres varient, mais on sait que les Québécois consomment en moyenne, pour l'ensemble de leurs activités, au moins 600 litres d'eau par jour. C'est deux fois plus qu'en Europe et 50 fois plus qu'en Afrique subsaharienne.

Or, ce qui est abondant ne pose pas de soucis. Pire, ce n'est pas digne d'intérêt. On ne s'est jamais vraiment préoccupé, ici, d'encadrer l'usage de l'eau. Vous voulez vendre de l'eau en bouteille ? Puisez dans le sol et servez-vous. Vous êtes trop fatigué, le printemps venu, pour déglacer votre entrée de garage à la pelle ? Sortez le boyau d'arrosage et faites fondre tout ça ! Votre usine est assoiffée ? On va (peut-être) vous demander une contribution financière, mais pour autant que vous dépolluez l'eau avant de la retourner dans le réseau, c'est bon. Les agriculteurs, les plus grands utilisateurs de la ressource, font généralement de leur mieux pour l'utiliser intelligemment, malgré des consignes gouvernementales qui changent au fil des années. Les villes paient de plus en plus cher pour rendre l'eau potable, tout en sachant que les fuites dans les réseaux souterrains sont grandes. Mais, comme ce qui est sous terre ne se voit pas, on peut attendre et repousser le problème.

Bref, c'est le royaume du laisser-faire. Le bordel. Ou plutôt, ça l'était. Les discussions tenues à l'occasion du forum organisé par Les Affaires, en collaboration avec Le Devoir et le 98,5 FM, montrent que les mentalités sont en train de changer, au point de briser de vieux tabous.

Même traitement pour tous

Oui, on finira par imposer des redevances aux gros utilisateurs. Le bar ouvert sera bientôt fermé. Le principe est d'ailleurs inclus dans un projet de règlement du ministère de l'Environnement qui porte sur la gestion de l'eau. La plupart des parties prenantes en reconnaissent d'ailleurs la pertinence... pour autant qu'il n'y ait pas de passe-droit et qu'on ajuste les contributions. Daniel Cotte, le président de Naya, a souligné qu'il acceptait l'idée mais, que les autres producteurs de liquides - bière, jus, boissons gazeuses - devraient aussi payer leur part. Le président de l'UPA, Christian Lacasse, a dit que ses membres sont eux aussi ouverts au principe, mais qu'il faudra soigneusement établir le cadre de ces redevances pour ne pas assommer l'agriculture québécoise. Idem pour l'industrie manufacturière, ce qu'est venu rappeler le président de Cascades, Alain Lemaire. Bref, on reconnaît que l'eau a une valeur, même s'il est difficile de l'établir.

Encore faut-il connaître l'état réel de nos réserves. L'eau de surface, lacs et rivières, est bien connue, mais qu'en est-il des nappes phréatiques ? Dans les faits, on est dans le noir. La cartographie de notre sous-sol est grandement incomplète. Cette méconnaissance fait déraper bien des débats, dont celui qui concerne le fameux gaz de schiste. Comment faire les meilleurs choix sans disposer de toute l'information ?

Par le passé, ce n'était pas grave. Plus maintenant. Avant même de penser faire un jour de l'argent avec son eau, le Québec doit apprendre à la gérer. Le message est en train de passer. L'auditoire a applaudi lorsque le directeur du service de l'environnement et du développement durable de Rivière-du-Loup a annoncé que sa ville entendait interdire l'arrosage des pelouses dès 2012. " Quand le temps demeure sec, il arrive que le gazon jaunisse. Mais il reverdit dès qu'il pleut. On peut laisser faire la nature ", a-t-il dit.

À travers le monde, on compte plus de gens qui possèdent un cellulaire que de gens ayant accès à de l'eau potable. C'est un représentant de l'organisme Développement et Paix qui l'a rappelé. Dans la salle, les gens sont restés saisis. Pensez-y la prochaine fois que vous ouvrirez le robinet. Ou votre cellulaire.

De mon blogue

www.lesaffaires.com/rene-vezina

Message aux Français tannés de leur pays

Dès qu'ils seront certains que les avions ont assez de kérosène pour se rendre chez nous, les Français désabusés de leur f... de pays toujours en grève devraient faire leurs valises et demander leur admission au Canada. (suite sur le blogue)

Vos réactions

" Je change de place n'importe quand avec un Français : architecture, histoire, cuisine, climat, à peu près tout est égal ou mieux en France qu'au Québec ! La chose dont je m'ennuierais, c'est du hockey... et encore ! Le foot n'est pas mal non plus !!!

- Deadly_Moogly

" L'idée de M. Vézina est bonne sur un plan, sauf que ça prendrait, au minimum, un million de Francais pour remettre à niveau cette langue bafouée. Et, par la suite, la protéger. "

- Sergi

" La France est un merveilleux pays, et les Français feraient bien d'y rester. Ici, ce qui nous attend n'est pas mieux... sauf que nous on ne se révoltera pas...on va accepter le tout sans réagir, se disant qu'on n'a pas le choix... "

- quaz

rene.vezina@transcontinental.ca

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