Logistique : les leçons des Forces

Publié le 28/04/2012 à 00:00

Logistique : les leçons des Forces

Publié le 28/04/2012 à 00:00

Caché entre les réservoirs des pétrolières et les installations portuaires, dans l'est de Montréal, le 25e Dépôt d'approvisionnement des Forces canadiennes n'attire pas vraiment l'attention. Mais le plus important complexe d'entreposage du pays est un bijou de gestion logistique qui vaut le détour.

Nous l'avons visité en compagnie de son grand patron, le lieutenant-colonel Jean-Claude Collard. À 37 ans seulement, ce titulaire d'un MBA de l'UQAM compte 20 ans de loyaux services au sein des Forces canadiennes. Créé en 1942, en pleine Deuxième Guerre mondiale, le 25e Dépôt est devenu, après la fermeture au fil des années d'autres installations du genre, l'un des deux seuls complexes nationaux d'entreposage de matériel des Forces canadiennes. L'autre, situé à Edmonton, est considérablement plus petit que celui de la Garnison Longue-Pointe.

«À cause de notre importance, nous avons un rôle de leadership au Canada en matière de logistique. Le 25e Dépôt est en fait un centre d'excellence en gestion de la chaîne d'approvisionnement», explique M. Collard, le commandant du Dépôt, l'équivalent d'un directeur général dans le civil.

Le «25e» est doté des outils de gestion informatisés les plus modernes : codes à barres, radiofréquence, etc. Son efficacité est comparable à celle de n'importe quelle chaîne de magasins du secteur privé. Avec plus de 1 500 clients, le 25e, dont la devise est «Je soutiens, donc je suis», pourrait en montrer à plusieurs grossistes sur le service à la clientèle. Une clientèle très exigeante : quand les couches jetables en solde dans la circulaire de Walmart sont livrées en retard, ça cause des maux de tête au directeur du magasin. Mais quand le matériel militaire se fait attendre sur le champ de bataille, ça peut être dramatique.

«Notre mission est d'assurer l'approvisionnement continu et ponctuel de toutes les bases militaires de l'est du pays, explique M. Collard, un géant de 1,95 mètre. Nous avons en plus le mandat international de soutenir les 17 missions actives des Forces dans le monde, dont celle qui est déployée en Afghanistan.»

Des centaines d'acheteurs

Au début de la chaîne, il y a les 500 gestionnaires d'articles, à Ottawa, qui ont la responsabilité d'acheter aux quatre coins du monde tout ce dont les Forces ont besoin pour la conduite de leurs opérations : pneus, vêtements, génératrices, armes, avions, véhicules blindés, lunettes d'approche, pièces de rechange, etc. «Ça demande une analyse des besoins très poussée en fonction du nombre d'opérations que nous menons, de la durée de vie des articles, des imprévus possibles, etc.»

Les fournisseurs livrent directement au 25e Dépôt (ou à celui d'Edmonton), sur rendez-vous seulement, pour maximiser l'utilisation du quai de débarquement qui compte 20 portes. De là, la livraison est faite sur les bases et aux endroits où les Forces mènent des opérations. À ce titre, le 25e Dépôt profite de sa proximité du port de Montréal, de la voie ferrée et des autoroutes. L'aéroport militaire de Trenton, en Ontario, est à 380 kilomètres, ce qui n'est pas si loin.

Le complexe traite chaque mois 9 500 commandes, dont 237 en moyenne sont non conformes, et effectue 21 200 livraisons par mois, dont 7,6 % sont classées «à haute priorité». «Le taux de satisfaction de notre clientèle est de 99 %», affirme M. Collard.

Le 25e emploie 300 personnes, dont 40 militaires. Il est situé sur la Garnison Longue-Pointe, à laquelle travaillent 920 militaires et 1 160 civils.

«À titre de commandant, j'ai les mêmes responsabilités que tout dirigeant d'entreprise, estime le lieutenant-colonel Collard, originaire de la région de Joliette. C'est-à-dire maximiser notre capacité d'entreposage, améliorer nos processus, tirer le maximum des nouvelles technologies et développer notre relève.»

DES COMMANDES TRAITÉES EN MOINS DE 24 HEURES

Les huit bâtiments qui composent le 25e dépôt, auxquels s'ajoute celui de Laval qui accueille les camps temporaires démontables, abritent en permanence 278 000 catégories d'articles d'une valeur se situant entre 3,2 et 3,7 milliards de dollars. Le 25e Dépôt fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Ce qui fait que la plupart des commandes sont traitées en moins de 24 heures. En 1998, l'année où le 25e a obtenu sa norme ISO 9002, ce temps de cycle (entre la demande et la sortie du matériel de l'entrepôt) était de... 9 jours ! Il a fallu 6 ans pour le ramener à une journée. Depuis, le 25e a obtenu la norme ISO 9001, en 2008. Le 25e avait également pris le virage vert avec la norme environnementale ISO 14 001, obtenue en 1999.

Le plus impressionnant de ces bâtiments est le Consol (parce qu'on y fait de la consolidation des activités) qui comprend une section de 60 pieds de hauteur et 17 rangées de 540 pieds de longueur parcourues par 9 chariots élévateurs sur rail. À elle seule, cette section permet d'entreposer 50 000 palettes. Il y a aussi deux bâtiments qui contiennent 2 000 véhicules. Lorsque ceux-ci reviennent de mission, ils sont évalués, et si leur état exige des réparations, celles-ci sont faites ailleurs, à différents endroits.

1,6 Le 25e Dépôt est constitué de huit bâtiments totalisant 1,6 million de pieds carrés, plus 500 000 pieds carrés d'entreposage extérieur. Cela représente plus de 36 terrains de football américain.

Le 25e Dépôt, qui fait partie du Groupe de soutien en matériel du Canada, unité du Commandement du soutien opérationnel du Canada, ne renferme aucun explosif ni aucune munition. D'abord, parce qu'entreposer de grandes quantités d'explosifs en pleine ville ne serait pas acceptable, et ensuite, parce que les Forces n'entreposent pas les armes et leurs munitions au même endroit pour des raisons de sécurité.

Notre dossier sur lesaffaires .com

Visitez le 25e Dépôt d'approvisionnement des Forces canadiennes sur lesaffaires.com/videos.

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