L'unilinguisme d'Anthropologie dénoncé sur Facebook

Publié le 20/10/2012 à 00:00

L'unilinguisme d'Anthropologie dénoncé sur Facebook

Publié le 20/10/2012 à 00:00

La chaîne américaine Anthropologie a provoqué une mini-controverse linguistique sur sa page Facebook en ouvrant son premier magasin au Québec. Le détaillant, qui vend des vêtements et des articles pour la maison, a annoncé qu'il fermait son site Web unilingue anglais parce qu'il contrevenait à la loi 101.

À partir du moment où une entreprise possède un magasin en sol québécois, son site doit être en français. De toute évidence, Anthropologie n'a pas jugé bon de faire traduire le sien en prévision de l'ouverture de son magasin le 12 octobre. Les Affaires n'a pas obtenu d'explications à ce sujet, malgré ses nombreux appels au service des relations publiques.

Les internautes n'ont pas tardé à inonder la page Facebook d'Anthropologie de commentaires, en français et en anglais. Plusieurs étaient déçus par «le manque de respect» de l'entreprise pour sa clientèle. D'autres étaient outrés qu'une grande entreprise n'investisse pas dans la traduction de son site. Certains, insultés, ont annoncé qu'ils n'iraient pas magasiner dans le commerce de la rue de la Montagne, vu les circonstances.

Un étudiant à HEC Montréal affirme que des professeurs de marketing de plusieurs universités utilisent déjà le cas d'Anthropologie pour montrer aux étudiants ce qu'il ne faut pas faire en ligne. «Votre manque de considération envers vos clients potentiels dans un nouveau marché ne passera pas inaperçu», ajoute-t-il.

«Vous débarquez à Montréal et décidez d'empêcher les adresses IP du Québec d'accéder à votre site Web. Cela est tellement offensant que je ne suis plus intéressée par la marchandise que vous vendez», a écrit, en anglais, une jeune fille. Anthropologie a aussi enlevé aux Québécois l'accès à la version américaine de son site, ce qui en a fâché plusieurs.

Quelques rares adeptes d'Anthropologie ont jugé qu'il était normal qu'une entreprise ne veuille pas traduire son site pour une population aussi réduite que celle du Québec. Ironique, une jeune femme a remercié le Québec pour ses «folles lois sur la langue» qui l'empêcheront de s'acheter ce qu'elle veut en ligne.

Un autre internaute croit que la véritable justification d'Anthropologie est tout autre. «Le site n'est plus accessible parce que les prix aux USA ne sont pas les mêmes qu'au Canada, pas parce qu'ils ne peuvent pas traduire en français ! C'est voulu pour qu'on ne puisse pas comparer les prix !»

D'autres détaillants pestent contre la loi 101

Anthropologie n'a pas répondu à ses «fans» pendant plusieurs jours, ce qui, en soi, a été mal reçu. Quand le détaillant a fini par prendre acte de la situation, il a écrit ceci : «Nous voulons offrir une excellente expérience de magasinage en ligne, tout en conservant notre petite touche qui rend le site si spécial. Entre-temps, nous vous attendons impatiemment en boutique !»

Mais cette réponse n'aura pas réussi à faire taire les mécontents et les sceptiques. «Avez-vous réellement l'intention de rendre ces deux sites accessibles au Québec ? Ou est-ce de l'hypocrisie ? demande un internaute. Le site d'Urban Outfitters est maintenant fermé depuis belle lurette ! Le magasinage en ligne est la seule solution pour rejoindre la plus large clientèle possible. Je n'irai pas en boutique à Montréal, à trois heures de route d'où je vis.»

Anthropologie appartient à Urban Outfitters, qui possède trois magasins du même nom au Québec depuis des années. Ce détaillant avait également bloqué l'accès à son site aux Québécois en raison de «contraintes linguistiques».

L'Office québécois de la langue française (OQLF) affirme qu'il arrive très rarement que des détaillants choisissent de bloquer l'accès à leur site aux Québécois pour se conformer à la loi 101. Hormis Anthropologie et Urban Outfitters, le porte-parole Martin Bergeron ne pouvait nommer que Club Monaco.

Au Québec depuis août dernier, Victoria's Secret ne propose qu'un site unilingue anglais, ce qui contrevient à la loi 101. Dans de tels cas, lorsqu'une plainte est reçue (personne n'a dénoncé Victoria's Secret), l'Office s'entend avec l'entreprise délinquante sur un échéancier de traduction «raisonnable» dont la durée «est très, très variable» et «dépend de la complexité du site», explique M. Bergeron, tout en précisant que l'OQLF n'a pas le pouvoir de faire fermer un site.

Si l'entente n'est pas respectée, le dossier est transmis au Directeur des poursuites criminelles et pénales qui peut imposer des amendes. Sephora (cosmétiques), qui est arrivé dans la province en 2008, a lancé une version française de son site quatre ans plus tard et n'a pas écopé.

La loi 101 a aussi fait parler d'elle la semaine dernière. Six détaillants américains - Best Buy, Costco, Gap, Old Navy, Guess et Walmart - ont demandé à la Cour supérieure de déclarer l'affichage de leur marque de commerce conforme à la Charte. L'OQLF les a mis en demeure d'ajouter un générique français à leur marque (tel que magasin, entrepôt, boutique).

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