Il faut rouvrir les régimes de retraite des salariés du public

Publié le 28/01/2012 à 00:00

Il faut rouvrir les régimes de retraite des salariés du public

Publié le 28/01/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

C'est une véritable bombe que la Fédération des contribuables canadiens (FCC) vient de lancer pour montrer le déséquilibre et l'injustice existant dans le système des régimes de retraite des Canadiens.

Selon la FCC, la contribution de 23,20 $ des Canadiens pour chaque dollar que les députés fédéraux investissent dans leur régime de retraite, est sans doute le plus généreuse du Canada. L'information courante véhiculée par le gouvernement faisait plutôt état d'une contribution de l'État de 5,80 $ pour chaque dollar versé par les députés.

S'il en est ainsi, c'est parce que le gouvernement garantit un rendement de 10,4 % sur ses engagements de retraite au bénéfice des députés. Autre particularité étonnante, ce régime ne possède aucun actif. Même l'infime cotisation des députés se trouve dans un compte fictif, au même titre que la contribution virtuelle du gouvernement. Quant aux engagements de retraite de l'État pour ses députés, ils s'élèveraient à environ un milliard de dollars, sur lequel Ottawa reconnaît le taux de rendement précité, quoi qu'il arrive dans les marchés. C'est toute une différence avec les pertes respectives de 25 %, 18,6 % et 18 % subies en 2008 par la Caisse de dépôt et placement du Québec, le Régime de pensions du Canada et le régime de retraite des enseignants ontariens (Teachers').

Le premier ministre Stephen Harper et deux de ses ministres ont déclaré avec raison que les députés devaient revoir leur régime de retraite, mais le député néo-démocrate Joe Comartin n'a rien trouvé de mieux à dire qu'il s'agissait d'un «écran de fumée» pour faire oublier des enjeux plus importants. Voilà une déclaration très éloquente d'un député d'un parti qui se dit près du monde ordinaire.

D'importants déficits actuariels

Une des questions à considérer est certainement le déficit des régimes des employés du gouvernement fédéral, qui atteindrait 143 milliards de dollars (G$) selon le fédéral et 227 G$ selon l'Institut Fraser.

Les fonctionnaires jouissent d'un régime à prestations déterminées (garanties par l'employeur), comme la presque totalité des salariés des provinces, des municipalités et des universités du pays. À cause de l'effondrement des taux d'intérêt et des rendements anémiques des placements depuis quelques années, il est probable que 100 % des régimes de retraite canadiens à prestations déterminées soient déficitaires.

Par ailleurs, comme 94 % des fonctionnaires du pays bénéficient d'un tel régime, cela veut dire que les déficits énormes de leurs régimes de retraite seront absorbés par les contribuables, dont les deux tiers n'ont même pas de régime de retraite de leur employeur. Quant au tiers des employés du privé qui bénéficient d'un régime d'employeur, plus du quart participent à un régime à cotisations déterminées, ce qui veut dire que leur rente de retraite sera aussi incertaine que celle que recevront les Canadiens sans régime d'employeur qui cotisent à un régime enregistré de retraite (REER) .

Grave injustice

La grave injustice créée par le fait que les régimes de retraite généreux et déficitaires de l'État sont financés par les taxes d'une grande majorité de contribuables qui n'ont pas de régime d'employeur se doit d'être corrigée. Sans quoi, comme l'a déjà déclaré le maire Régis Labeaume, il y aura un risque de «révolte» des citoyens lorsqu'ils constateront l'iniquité du déséquilibre actuel.

Les municipalités québécoises, dont les salariés bénéficient déjà d'une rémunération supérieure en moyenne à celles des autres Québécois, accusent un déficit global de capitalisation de leurs caisses de retraite de 3 G$. Certaines ont revu les bénéfices de leurs régimes de retraite et concluent des ententes de partage de leur déficit. C'est le cas de Rimouski avec ses cols bleus, ses cols blancs et ses cadres, de même que de Rivière-du-Loup avec ses cadres.

Dans l'ensemble du Québec, une estimation de la Régie des rentes fait état d'un déficit global de 26 G$ pour l'ensemble des régimes complémentaires qu'elle surveille. Alors qu'il a obligé les entreprises à rembourser les déficits de solvabilité de leurs caisses de retraite, Québec a laissé les municipalités et les universités accroître les leurs.

Il n'y a pas ici de recette magique. Il faudra accroître l'âge de la retraite, réduire les bénéfices et hausser la contribution des salariés du secteur public du pays. Cela est crucial, car c'est une question de justice envers l'ensemble des citoyens.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Ottawa accroîtra sa part de financement des régimes de santé des provinces de 6 % par année de 2014 à 2017 et, ensuite, au taux de croissance du PIB avec un seuil minimum de 3 %, ce qui obligera les provinces à mieux gérer. Il leur donnera aussi plus de latitude dans la gestion des soins, ce qu'elles ont toujours réclamé. Ottawa fait pour la santé ce qu'il fait déjà pour l'éducation. Mais comme d'habitude, les provinces jouent les vierges offensées.

Je n'aime pas

Le fiasco financier du projet de train dans l'est de Montréal (coût doublé à 700 M$ pour transporter 11 000 personnes par jour - notre photo) ne surprend pas si on en juge par la piètre gouvernance en place à l'Agence métropolitaine de transport : un pdg qui est aussi président de son conseil, trois élus de la région qui sont, par définition, en conflit d'intérêts et trois personnes du milieu socioéconomique, parmi lesquelles il n'y a ni spécialiste en transport ni comptable. Tout ce beau monde est bénévole, ce qui n'a rien de motivant. Ajoutons-y une dose de patronage (le pdg est un ex-directeur général du Parti libéral) et nous avons la recette parfaite pour frapper un mur.

jean-paul.gagne@transcontinental.ca

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